L’identification à la nation dans les représentations sociales des enseignants d’histoire québécois


L’
enseignement de l’histoire fait l’objet de vifs débats au Québec et dans plusieurs sociétés occidentales de manière récurrente depuis plusieurs années.1 Le renouvèlement des curriculums est particulièrement propice à ce genre de discussion. Le programme de formation en Histoire et éducation à la citoyenneté (MELS, 2007) a été implanté dans le cadre d’une vaste réforme de tous les programmes d’étude québécois. Ce cours a particulièrement soulevé les passions, à un point tel que le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur remplace progressivement ce programme depuis septembre 2016, quelques années seulement après son implantation.

Les raisons de remettre ce programme en cause varient, mais plusieurs ont estimé qu’il proposait une version gommée de l’histoire, qu’il n’était pas représentatif de la mémoire collective québécoise (Bouvier et Lamontagne, 2006 ; Comeau et Lavallée, 2008). Les échanges à propos du curriculum d’histoire ont souvent tourné autour de la place qu’il occupe dans la formation de l’identité. Pour les uns, il devait contribuer à transmettre la mémoire collective québécoise. Pour les autres, il devait développer des habiletés intellectuelles utiles aux futurs citoyens que sont les élèves (Boutonnet, Cardin et Éthier, 2011 ; Éthier et Lefrançois, 2011).2

Ce débat soulève plusieurs préoccupations. Est-ce que l’enseignement de l’histoire doit contribuer au maintien et à la construction de l’identité nationale ? A-t-il seulement le pouvoir de le faire ? Comment les enseignants mettent-ils en application les programmes ? Leur rapport à la nation intervient-il dans cette mise en application ?

Cet article présente notre contribution à la discussion sur l’enseignement de l’histoire du Québec. Il présente les résultats de la phase qualitative de notre recherche doctorale (Lanoix, 2015).

CADRE THÉORIQUE

Cette section vise d’abord à définir les concepts centraux utilisés dans la recherche. Après les avoir détaillés, nous discutons de leur portée pour notre étude, puis nous présentons quelques études qui touchent des sujets proches du nôtre. Enfin, nous fixons la question qui guide la mise en œuvre de notre recherche.

Afin de mener à bien notre enquête, certains concepts opératoires doivent être définis. Certains de ceux-ci ne sont pas spécifiques à l’éducation, mais touchent des domaines qui doivent être considérés dans le traitement de notre question de recherche. Ces concepts sont la nation, les représentations sociales et les curriculums formel, caché et réel. Cette section vise donc à définir ces concepts, mais également à montrer les liens qui les unissent. Le concept de nation, en particulier, est généralement peu élaboré dans les recherches en didactique de l’histoire. Il est d’autant plus important de le définir qu’il est très fréquemment utilisé pour défendre ou attaquer certaines conceptions de l’enseignement de l’histoire.

Nation

La nation est un concept central de notre recherche puisque sa préservation est au cœur des discussions sur l’enseignement de l’histoire, au Québec comme ailleurs dans le monde. Politiciens, historiens, journalistes et autres personnalités publiques se portent périodiquement à la défense de la nation à travers une critique de l’enseignement de l’histoire. La plupart des intervenants du débat partagent l’idée que l’enseignement de l’histoire peut avoir une influence sur l’avenir de la collectivité, que ce soit pour perpétuer la culture nationale ou pour contribuer à former des citoyens critiques qui agiront sur la société pour la rendre meilleure.3 Si les partisans d’une approche de l’enseignement de l’histoire axé sur le développement d’habiletés intellectuelles ne nient pas l’existence de la nation québécoise ou la pertinence du concept historique de nation, ils affirment cependant que la création d’un lien affectif à la nation ne devrait pas faire partie des finalités de l’enseignement de l’histoire. Quoi qu’il en soit, il nous apparait clair que la nation fait partie intégrante du débat et qu’une étude approfondie de la question de l’enseignement de l’histoire ne peut faire l’économie de la définition de ce concept.

Les définitions de la nation varient en fonction des auteurs et de l’angle sous lequel ils l’étudient. Smith (2003) a défini la nation comme « une population humaine occupant un territoire historique et partageant des mythes et des mémoires, une culture publique, des lois et des coutumes communes à tous ses membres » (p. 24). Anderson (1983) l’a considérée comme une communauté politique souveraine, limitée et imaginée au sens où elle est le fruit d’une construction de l’Homme qui ressent un lien virtuel, mais bien réel, avec tous les membres de sa communauté nationale. Le caractère construit de la nation est d’ailleurs un élément central de ce concept. On ne peut véritablement comprendre la nation si on la considère comme donnée ou naturelle.

Les auteurs s’accordent généralement pour dire que le nationalisme comme force sociale a vécu son âge d’or dans la première moitié du 20e siècle. Les évènements dramatiques de cette époque comme les guerres mondiales et les crises économiques poussent les collectivités à chercher un facteur qui stabiliserait leur quotidien et leur avenir (Hobsbawm, 1990). Il est également clair que la vigueur du nationalisme comme mouvement politique n’est plus, au 21e siècle, aussi grande qu’au début du 20e siècle. Cela ne veut pas dire qu’il s’est complètement éteint. Pour Anderson (1983) comme pour Smith (2003), l’attachement à la nation est toujours une force sociale importante.

La légitimité des nations repose largement sur le passé, l’histoire et la mémoire. Depuis leur émergence, les nations cherchent à retracer et à valoriser leurs origines et leurs moments glorieux. Ainsi, retracer les origines de la nation dans un passé le plus lointain possible lui donne des assises plus solides et une plus grande légitimité à ses institutions. En ce sens, l’enseignement de l’histoire uniforme à l’école a été un moyen privilégié des nations pour transmettre la mémoire depuis le 19e siècle (Audigier, 1995 ; Carretero, 2011).

Compte tenu de ces éléments, notre étude doit absolument considérer le fait que l’enseignement de l’histoire ne peut pas être pensé ni étudié en dehors du monde que nous venons de décrire. L’enseignement de l’histoire est l’un des véhicules privilégiés de transmission du passé national et donc, de consolidation de l’identité. Les enseignants, tout comme les concepteurs des programmes de formation et les observateurs qui critiquent ces mêmes programmes vivent dans un monde où l’idée d’appartenir à une nation et de s’inscrire dans le passé de celle-ci exerce une influence certaine sur les représentations sociales de chacun. Ces représentations de la nation surpassent-elles les autres appartenances identitaires, les pratiques professionnelles et les prescriptions du ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur ? Notre recherche entend éclairer davantage cette question.

Représentations sociales

Carl Becker (1958) a écrit que l’histoire qui avait le plus d’influence sur la vie de la communauté et les évènements courants est celle que les gens ordinaires ont en tête (p. 61).4 Sans les nommer comme telles, Becker faisait déjà référence aux représentations sociales de l’histoire. Comment savoir ce que les enseignants d’histoire connaissent et pensent à propos de l’histoire du Québec ? Comment ces idées agissent-elles sur leur enseignement ? Le programme de formation peut-il modifier leurs perceptions ? Pour tenter d’y voir plus clair, nous utilisons le concept de représentation sociale. Nous en identifions ici les principales caractéristiques pour ensuite établir des liens avec les concepts de nation et de mémoire collective.

Le projet d’expliquer le fait que des groupes partagent des conceptions et des coutumes a d’abord été entrepris par Durkheim au 19e siècle. Celui-ci élabore le principe des représentations collectives, à savoir des idées relativement homogènes dans chaque société et visant à uniformiser la pensée et l’action (Moscovici, 2003). Le principe d’idées ou de représentations communes aux membres d’un même groupe est repris par Moscovici et d’autres chercheurs depuis les années 1960 sous la forme de représentations sociales. Abric (2003) a défini les représentations sociales (RS) comme :

un ensemble organisé d’informations, d’opinions, d’attitudes et de croyances à propos d’un objet donné. Socialement produite[s], elle[s sont] fortement marquée[s] par des valeurs correspondant au système socio-idéologique et à l’histoire du groupe qui [les] véhicule pour lequel elle constitue un élément essentiel de sa vision du monde. (p. 59)

C’est donc dire que certains groupes partagent une même vision d’objets de savoir et que cette vision peut guider leurs actions dans certaines circonstances. Flament et Rouquette (2003) ont ajouté qu’une RS se traduit dans le jugement et dans l’action. Cette définition nous permet d’envisager qu’il est possible de sonder les RS d’un groupe en particulier, les enseignants d’histoire du Québec, sur un ou des objets spécifiques, comme l’histoire nationale et son enseignement.

Une RS se compose de plusieurs éléments et, comme l’a souligné Abric (2003), il est primordial de connaitre la hiérarchie des composantes d’une RS et les liens entre celles-ci pour bien en comprendre le sens. Ce principe de hiérarchie entre les composantes d’une RS permet d’en introduire un autre, celui du noyau central. Le concept de noyau central soutient que certains éléments d’une RS sont fondamentaux à celle-ci et qu’on ne peut les changer sans modifier significativement la RS elle-même. Par opposition, d’autres éléments sont périphériques, c’est-à-dire qu’ils sont moins importants dans la définition de la RS. Ils peuvent être changés plus facilement, et même être contradictoires avec d’autres éléments sans que l’essentiel de la RS en souffre (Seca, 2001).

Comme l’a écrit Wertsch (1997), on ne peut comprendre les actions des individus si on ne les place pas dans le contexte social, culturel et historique du groupe dans lequel ils évoluent. Les individus utilisent des outils culturels (cultural tools) issus de ce contexte pour guider leurs actions. Il ajoute que l’État moderne — et tout le bagage culturel, historique et symbolique qui l’accompagne — est un producteur particulièrement efficace d’outils culturels et de récits, en bonne partie parce que sa survie dépend de l’adhésion des citoyens aux valeurs et au récit qu’il propose (Wertsch, 2004). Ces considérations nous apparaissent créer un pont entre les notions de mémoire et de RS. Halbwachs (1950) a présenla mémoire comme un processus en mouvement constant ne retenant du passé que ce qui peut encore vivre dans la conscience de la collectivité. La conscience collective, en grande partie forgée par l’histoire, est intrinsèquement liée à la nation et à son incarnation politique, l’État-nation moderne.

Certains chercheurs se sont intéressés aux liens qui unissent les RS et la mémoire. Pour Jodelet (2010), les RS et les mythes ont plusieurs points en commun parce qu’ils sont deux formes de pensée sociale et qu’ils comportent tous deux une part de symbolisme. Les mythes et les RS jouent en effet des rôles semblables dans la société au sens où ils permettent aux individus de comprendre le monde qui les entoure et de les insérer dans un groupe. Le mythe aurait ceci de différent avec les RS qu’il était considéré comme homogène et total pour les sociétés primitives. Les recherches des dernières années ont montré que les RS étaient hétérogènes dans une certaine mesure et qu’elles pouvaient être remises en question (Jodelet, 2010).

Ces considérations nous amènent à tisser des liens avec le contexte québécois. Le débat actuellement en cours oppose principalement deux visions — on pourrait dire deux représentations — de l’enseignement de l’histoire nationale. D’autres représentations de l’histoire et de la mémoire collective québécoise se mêlent à ces représentations. Il nous apparait donc pertinent d’envisager ce conflit sous l’angle de la concurrence entre deux RS différentes d’un même objet, l’enseignement de l’histoire nationale. Dans ce contexte, l’utilisation du concept opératoire de RS nous apparait prometteuse pour l’analyse du débat actuel, mais surtout pour comprendre où se situent les enseignants d’histoire dans cette dynamique.

Curriculums et transposition didactique

Les deux sections précédentes ont bien montré que l’idée de nation exerce toujours un attrait pour les individus et qu’elle est encore au cœur des institutions. La nation est accompagnée de divers éléments culturels, politiques et symboliques qui lui donnent une certaine légitimité, entre autres en prouvant qu’elle existe depuis longtemps. Nous avons également exploré le concept de représentation sociale qui permet d’expliquer comment un groupe en vient à forger une image commune d’un objet comme la nation. Si on peut maintenant envisager comment la nation influence les représentations sociales, il nous reste à déterminer comment elle déteint sur l’école et plus précisément sur l’enseignement de l’histoire. Les concepts de curriculum formel, caché et réel nous permettent de mieux comprendre comment cette idée peut agir sur l’enseignement. Le concept de transposition didactique nous permet, quant à lui, de mieux saisir la façon dont l’enseignant interprète le curriculum formel.

Introduisons d’abord quelques éléments concernant les curriculums. Le curriculum formel (CF) a été présenté par Perrenoud (1994) comme le parcours éducatif prévu par les textes officiels. Il est composé de divers documents émanant des institutions officielles, comme le programme de formation, les épreuves uniformes ou tout autre document précisant les contenus de formation. Nous savons que l’expérience vécue par les élèves varie en fonction de plusieurs facteurs et que très peu d’entre eux vivront dans les faits exactement le cheminement prévu par les textes officiels. On appelle ce parcours vécu le curriculum réel (CR). Notre recherche touche à ce qui se produit entre les deux, c’est-à-dire au moment du processus où interviennent une variété de facteurs qui font en sorte que le CF est interprété et modifié par les enseignants et les écoles et qu’il est soumis à toutes sortes d’influences.

Dans le cas qui nous intéresse, le CF se compose d’un certain nombre d’éléments. Le programme de formation est le premier document publié par le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS, 2007) dans lequel sont précisés les compétences à enseigner ainsi que les savoirs de référence. Le MELS a également publié un document intitulé Progression des apprentissages (2011b) qui énumère les détails des connaissances déclaratives devant être maitrisées par les élèves. Enfin, le MELS fait paraitre un document précisant les cadres d’évaluation des apprentissages (2011a). On peut également considérer que l’épreuve ministérielle uniforme de quatrième secondaire fait partie du CF puisqu’elle représente une partie des exigences du MELS en matière d’apprentissage de l’histoire du Québec.

On sait qu’il existe un écart plus ou moins grand entre le CF et l’expérience effectivement vécue par les élèves, le curriculum réel (CR, Perrenoud, 1994). Une partie de cette différence peut s’expliquer par les actions posées par l’enseignant. Celui-ci est au centre de la transition entre le CF et le CR parce qu’il réalise l’adaptation du CF en une pratique concrète (Perrenoud, 1998). En effet, l’enseignant opère la transposition didactique interne, qui transforme les savoirs à enseigner en savoirs enseignés (Chevallard, 1991). Ainsi, le professionnel qu’est l’enseignant utilise la marge de manœuvre qui lui est laissée pour adapter le programme de formation afin de favoriser l’apprentissage de ses élèves. C’est ici que peuvent intervenir les représentations sociales des enseignants à propos de divers objets, dont la nation. L’enseignant lit et interprète le CF à la lumière de ces idées.

Le CF est adapté à la réalité de la classe et de l’école en fonction de multiples facteurs que Perrenoud (1993) a appedes variables médiatrices, dont fait partie la transposition didactique. D’autres facteurs liés aux conditions de pratique comme les attentes des collègues, l’influence de la culture et du climat de travail de l’établissement d’enseignement, la composition sociologique de la classe et les pressions de la communauté locale agissent également sur l’interprétation que les enseignants font du programme de formation.

La combinaison des concepts de nation, de représentations sociales, de curriculum formel et réel, ainsi que de transposition didactique nous permet d’opérationnaliser notre recherche. D’abord, la nation est au coeur de nos préoccupations. Elle interpelle l’histoire et la mémoire pour assurer sa pérennité et teinte le regard que l’on pose sur l’enseignement de l’histoire. La place de la nation dans l’enseignement de l’histoire a été le point focal du débat engagé depuis 2006 au Québec. Ensuite, les RS offrent un cadre d’analyse qui permet de cerner l’idée qu’un groupe de la société, les enseignants d’histoire du Québec, se fait de la nation et de sa place dans l’enseignement de l’histoire. Enfin, la transposition didactique nous permet de situer ces RS dans les facteurs qui influencent l’interprétation que font les enseignants du curriculum formel pour le concrétiser en curriculum réel.

À la suite de la présentation des concepts centraux de notre recherche, nous en arrivons à définir notre question spécifique de recherche : quelles sont les représentations sociales des enseignants d’histoire du Québec des objets « finalités de l’enseignement de l’histoire » et « identification à la nation dans l’enseignement de l’histoire » ? Quelle est la place du programme de formation dans les sources de ces représentations sociales ?

MÉTHODOLOGIE

Cette section présente les choix méthodologiques que nous avons faits en vue d’apporter des éléments de réponse à notre question de recherche. Une part importante de celle-ci s’intéresse aux pratiques enseignantes, un phénomène examiné sous plusieurs angles par les chercheurs en éducation depuis quelques années. Altet (2002) définit cette pratique comme « une activité professionnelle située, orientée par des fins, des buts et les normes d’un groupe professionnel. Elle se traduit par la mise en œuvre des savoirs, procédés et compétences en actes d’une personne en situation professionnelle » (p. 86).

Une approche qualitative nous est apparue essentielle dès le départ, puisque les RS des enseignants d’histoire du Québec n’ont pas été examinées sous l’angle exact qui nous intéresse. Certes, nous aurions pu nous inspirer des résultats d’autres recherches sur les RS pour mener une enquête strictement quantitative. Il nous apparait cependant nécessaire de discuter avec des enseignants et de creuser la question.5

Le premier objectif de la recherche est de décrire les composantes des RS des enseignants à propos des finalités de l’enseignement de l’histoire et de la place de la nation dans cet enseignement. Le second objectif est d’identifier les principaux facteurs qui influencent les RS des enseignants d’histoire.

Participants

Les participants à la recherche sont des enseignants d’histoire du Québec du deuxième cycle du secondaire. Tous les participants enseignent dans des écoles secondaires publiques francophones. Huit enseignants participent à cette phase de la recherche. Nous avons sollicité la participation des enseignants par l’intermédiaire du Groupe des responsables en univers social (GRUS), un regroupement des conseillers pédagogiques en univers social6 de tout le Québec. Cette démarche a mené à la création d’un échantillon par volontaires, c’est-à-dire que les participants à la phase qualitative de la recherche sont ceux qui ont répondu favorablement à une demande de collaboration (Parent, 2003).

Parmi les huit participants aux entrevues, on compte trois femmes et cinq hommes provenant de différentes régions du Québec. Ils ont en moyenne 16,3 ans d’expérience en tant qu’enseignants. Le tableau 1 présente quelques informations à propos de chacun des participants.

Tableau 1. Profil des participants

Pseudonyme et sexe

Années d’expérience au secondaire

Région
d’enseignement

Formation

Claude (homme)

17 ans (dont 15 en histoire du Québec)

Montérégie

Baccalauréat en économie

Paul (homme)

15 ans (dont 8 en histoire du Québec)

Montérégie

Formation en enseignement de l’histoire et de la géographie suivie à l’étranger

Maude (femme)

13 ans (dont 7 en histoire du Québec)

Laval

Baccalauréat en enseignement secondaire (volet sciences humaines) et Maitrise en didactique de l’histoire

Steve (homme)

18 ans (dont 11 en histoire du Québec)

Lanaudière

Baccalauréat en enseignement secondaire (volet sciences humaines)

Daniel (homme)

3 ans (toutes en histoire du Québec)

Estrie

Baccalauréat en enseignement secondaire (volet sciences humaines)

Véronique (femme)

17 ans (dont 12 en histoire du Québec)

Abitibi-Témiscamingue

Baccalauréat en enseignement secondaire (volet sciences humaines) et maitrise en histoire

Claudie (femme)

18 ans (dont 6 en histoire du Québec)

Montérégie

Baccalauréat en géographie, maitrise en environnement et certificat en pédagogie

 

Outils de collecte de données

Nous avons mené des entretiens avec chacun des huit participants. La première partie de l’entretien se déroule sous la forme d’une entrevue semi-structurée (Van der Maren, 1996). Cette partie de l’entretien a pour objectif de faire ressortir les représentations de l’enseignant à propos des objets pertinents à notre recherche par des questions ouvertes. Nous avons ainsi préparé un schéma d’entrevue (voir Annexe A) qui nous permet d’aborder les principaux éléments constituant la représentation sociale de la nation et de l’enseignement de l’histoire de chaque sujet. Ce schéma d’entrevue vise à amener l’enseignant à discuter de la place qu’il accorde à l’identification à la nation dans ses pratiques enseignantes.

La seconde phase de l’entretien est une tâche d’association d’idées qui repose sur la méthodologie des recherches sur les représentations sociales et qui vise à corroborer les affirmations de la première phase (Abric, 2003 ; Bouhon, 2010 ; Flament et Rouquette, 2003). Nous proposons ainsi une série de mots ou d’expressions auxquels nous demandons au sujet d’associer quatre idées. Les items retenues sont « nation », « programme d’histoire et éducation à la citoyenneté » et « votre pratique enseignante ». Ces trois énoncés nous apparaissent toucher aux principaux éléments de notre problématique. En combinaison avec l’entretien semi-dirigé, cette tâche d’association d’idées nous permet d’appuyer davantage nos données en vérifiant si les participants évoquent les mêmes idées à l’oral qu’à l’écrit.

Analyse des données

Les données recueillies ont été traitées dans le but de décrire les représentations des enseignants. Nous collectons cependant différents types de données et cela nous incite à adopter une méthodologie hybride. Comme nous l’avons déjà mentionné, la collecte de données se déroule en deux temps : l’entretien initial et l’association d’idées. L’information colligée à ces divers moments est traitée de manières différentes, mais cohérentes avec nos objectifs de recherche.

Puisque notre objectif est avant tout de décrire les RS des enseignants à propos de certains objets, nous exposons dans un premier temps l’essentiel des réponses des participants sans nécessairement les classer dans une catégorie trop rigide. Nous les situons tout de même par rapport aux finalités de l’enseignement de l’histoire identifiées par Audigier (1995). La première de ces finalités est patrimoniale et civique. Elle vise à « transmettre une représentation partagée du passé par un récit continu depuis les origines jusqu’à nos jours » (Audigier, 1995, p. 67). Cette finalité appelle une conception transmissive de l’enseignement et cherche avant tout l’adhésion de l’élève à un discours déjà construit. Audigier propose également la finalité intellectuelle et critique qui vise l’initiation des élèves aux rudiments de la méthode scientifique. Dans le cadre de cette finalité, l’élève est amené à adopter une attitude critique envers le savoir et à considérer que celui-ci est construit. Enfin, Audigier présente la finalité pratique, qui aspire à développer chez l’élève des habiletés concrètes qui lui serviront dans sa vie sociale et professionnelle d’adulte. Nous précisons si les vues exprimées par les participants sont davantage associées aux finalités patrimoniales et civiques, intellectuelles et critiques ou pratiques. Nous pouvons, de cette manière, dresser un portrait global du groupe d’enseignants rencontré.

La tâche d’association d’idées fait l’objet d’un traitement semblable à la première partie de l’entretien, sinon que nous gardons une trace écrite des réponses. Ainsi, chaque participant est invité à écrire les idées qui lui semblent les plus pertinentes à propos des trois inducteurs déjà mentionnés (nation, enseignement de l’histoire et ma pratique enseignante). Comme les participants sont également invités à s’exprimer verbalement sur ce qu’ils écrivent, il est possible au chercheur de mesurer l’importance de chaque idée inscrite lors de l’écoute et de l’analyse des entretiens.

Ainsi, cette partie de l’entretien permet de vérifier si les participants répondent sensiblement la même chose aux questions et à l’association d’idées. Le chercheur possède ainsi des outils pour évaluer la cohérence des réponses des enseignants rencontrés.

RÉSULTATS

Nous rapportons ici une analyse des données récoltées durant la phase qualitative de la recherche. Nous procédons en identifiant les éléments qui nous semblent communs à plusieurs des participants et ceux pour lesquels nous avons observé des divergences.7

Ressemblances entre les participants

Nous présentons ici quelques observations sur certaines caractéristiques qui nous semblent communes aux participants. Ces caractéristiques ne sont pas nécessairement présentes sous la même forme chez tous les participants, mais montrent tout de même des éléments qui ressortent dans le discours des enseignants d’histoire que nous avons rencontrés.

Transmission de la mémoire collective. Le premier élément qui a retenu notre attention est le fait que les enseignants rencontrés enseignent une histoire résolument située, ancrée dans la mémoire québécoise. Chacun à leur façon et à divers degrés, ils s’inscrivent dans une logique de transmission des principaux éléments de l’histoire nationale québécoise. Bien entendu, la transmission de la mémoire collective n’est pas la finalité prioritaire pour tous les enseignants, mais aucun d’entre eux ne prétend enseigner l’histoire du Québec avec détachement, comme si c’était celle d’une autre société. On le voit très bien lorsque les enseignants parlent des finalités de l’enseignement de l’histoire et affirment qu’on doit savoir d’où on vient, « nos racines » (Claude) et que l’enseignement de l’histoire doit « rendre compte d’une trame historique, d’une société sur un territoire donné » (Jean). En fait, on peut affirmer que les enseignants interrogés s’insèrent plus ou moins consciemment eux-mêmes dans l’histoire du Québec et se voient, dans une certaine mesure, comme des passeurs de mémoire. En ce sens, les finalités patrimoniales et civiques font indéniablement partie des préoccupations des enseignants que nous avons rencontrés.

Impact du programme de formation. Dans la plupart des cas, les participants soutiennent que le Renouveau pédagogique n’a rien changé à cette façon de concevoir l’enseignement de l’histoire. Même ceux qui assurent que leur pratique a été grandement influencée par le changement de programme, comme Paul et Steve, maintiennent l’identité au cœur de leur enseignement. Évidemment, tous n’abordent pas l’identité sous le même angle. Entre Paul, qui affirme chercher l’adhésion des élèves à l’identité québécoise, Steve, qui vise l’adhésion critique, et Jean, qui désire que l’élève construise sa propre identité, il existe des différences importantes de conceptions.

Les données recueillies durant les entrevues ne confirment donc pas les craintes formulées à l’endroit du programme d’Histoire et d’éducation à la citoyenneté. Si celui-ci a été qualifié d’édulcoré, de fédéraliste ou de dénationalisé (Bouvier et Lamontagne, 2006 ; Robitaille, 2006), il ne semble pas donner lieu à un enseignement correspondant à ces qualificatifs. On peut y voir une cause dans la distance que prennent les enseignants vis-à-vis du programme. Nous avons en effet remarqué que les participants ne considèrent pas le programme de formation comme une influence majeure sur leur conception et leur pratique de l’enseignement de l’histoire. Si certains disent s’en inspirer, la plupart affirment qu’il n’est qu’une balise. Pour d’autres, le programme de formation est un document sans influence sur leur pratique ; c’est le cas de Daniel qui se réfère plutôt à la Progression des apprentissages.

Les raisons qui amènent les enseignants à mettre en partie ou totalement de côté le programme de formation varient. Claude considère carrément qu’il est inadéquat, alors que Véronique affirme qu’elle visait le développement de la pensée historienne chez les élèves avant l’implantation du programme. La redondance entre la troisième et la quatrième secondaire est toutefois une critique récurrente formulée à l’endroit du programme d’Histoire et d’éducation à la citoyenneté. Plusieurs enseignants pensent que la structure chronologique en troisième secondaire et thématique en quatrième secondaire du programme complique leur travail, ce qui les conduit à prendre davantage leurs distances face à ce document. Du reste, nos observations concordent avec celles de van Hover et Yeager (2007) qui soutiennent que ce sont les finalités propres à chaque enseignant qui dictent la pratique réelle de l’enseignement de l’histoire, et non les programmes de formation.

En revanche, l’épreuve unique de quatrième secondaire exerce un pouvoir bien réel sur la pratique de l’enseignement de l’histoire. La nature et l’importance de cet examen dans le cheminement scolaire des élèves obligent les enseignants à adapter leur enseignement pour les préparer adéquatement à le passer. Tous les enseignants qui œuvrent en quatrième secondaire que nous avons rencontrés disent prendre du temps pour préparer l’examen, que ce soit sous la forme de cours accordés à la révision ou de périodes de récupération. Nous remarquons également que la forme de l’examen semble avoir incité les enseignants à travailler davantage avec les documents historiques, puisqu’on demande aux élèves de le faire dans l’épreuve.

Place du présent dans l’enseignement de l’histoire. Nous avons également remarqué que le présent occupe une place centrale dans la conception de l’enseignement de l’histoire qu’ont les enseignants que nous avons rencontrés. En effet, la plupart d’entre eux ont signifié que l’enseignement de l’histoire devait servir aux futurs citoyens sous une forme ou une autre, tout en évitant d’employer l’expression « éducation à la citoyenneté ». Pour Claude, l’histoire permet de comprendre « pourquoi nous sommes ici, qu’est-ce qui explique la situation actuelle », alors que, pour Jean, elle permet de donner des points de repères historiques et culturels communs aux membres d’une société. Nous avons retrouvé cette idée de comprendre la société actuelle à l’aide du présent chez Paul également, qui vise explicitement à montrer à ses élèves que l’histoire peut leur servir dans la vie de tous les jours. Pour Maude comme pour Daniel, une bonne connaissance de l’histoire permet d’éviter de répéter les erreurs du passé. Pour Steve, l’histoire permet d’assurer la continuité du groupe dans lequel on vit. Pour Véronique également, l’histoire permet de comprendre la société dans laquelle on vit. Claudie est la seule enseignante qui n’a pas mentionné d’éléments liés au présent lorsque nous avons abordé les finalités de l’enseignement de l’histoire. C’est donc dire que les enseignants d’histoire que nous avons rencontrés voient en général une utilité actuelle à l’enseignement et à l’apprentissage de l’histoire. S’ils n’ont pas parlé d’éducation à la citoyenneté, ils ont cependant reconnu qu’on enseigne l’histoire pour qu’elle soit utile aux futurs citoyens que sont les élèves. Ce discours nous apparait toucher certains éléments des finalités intellectuelles et critiques au sens où l’histoire est perçue comme un outil d’interprétation et de compréhension des enjeux sociaux actuels. Par contre, les participants à notre recherche n’évoquent pas réellement le sens critique qu’auraient développé les élèves dans leur apprentissage de l’histoire. L’utilité concrète de l’histoire pour le futur citoyen demeure vague.

Neutralité politique des enseignants. Ce constat nous amène à aborder un autre aspect des réponses des enseignants, la prise de position politique. S’ils veulent aider les élèves à prendre des décisions mieux informées en tant que citoyens, les enseignants que nous avons rencontrés refusent très clairement d’être associés à une quelconque forme de propagande. Puisque l’histoire est fréquemment interpelée dans les discours sur l’avenir constitutionnel du Québec dans le Canada, les enseignants avec qui nous avons discuté disent consentir un effort pour demeurer impartiaux. Claude par exemple, ne révèle pas son opinion politique souverainiste ou fédéraliste aux élèves, même s’il assure que son objectif est de mettre les élèves en contact avec leurs racines et de créer un certain attachement à la nation québécoise. Maude tient un discours semblable tout en affirmant qu’il ne faut pas avoir peur de présenter et de suivre la trame historique nationale. Daniel, qui se dit ouvertement souverainiste, affirme toujours présenter les deux côtés de l’histoire, fédéraliste et souverainiste. Véronique se dit très consciente du pouvoir qu’elle pourrait avoir sur les idées des élèves, mais soutient que les enseignants ne devraient pas être des outils de propagande : elle désire cependant transmettre un attachement à l’histoire et aux valeurs du Québec à ses élèves. Claudie croit également qu’il est important que ses élèves ne devinent pas ses allégeances politiques à travers les propos qu’elle tient en classe.

Ces réponses à propos de la neutralité politique des enseignants d’histoire nous amènent à quelques constats qui nous semblent importants. D’abord, les enseignants que nous avons rencontrés semblent avoir intégré un discours résolument antipropagande. Pour eux, il n’est pas question d’être la courroie de transmission d’une idéologie politique. Par contre, plusieurs des répondants visent aussi à créer un attachement à la nation québécoise chez leurs élèves. Il semble donc qu’ils distinguent clairement, dans leur discours du moins, l’appartenance à la nation et l’adhésion à l’option politique de la souveraineté. En ce sens, ils réagissent comme la plupart des enseignants d’histoire dans le monde en considérant qu’il est normal de valoriser le passé national (Barton et Levstik, 2004 ; Carretero, 2011). Ils adoptent par contre un discours spécifique au Québec en évitant de se positionner politiquement sur l’enjeu de la souveraineté du Québec.

Différences entre les participants

Nous présentons ici quelques différences qui nous paraissent marquantes entre les enseignants que nous avons rencontrés dans le cadre de notre recherche. Nous explorons en particulier l’arrimage entre les finalités de type intellectuelles et critiques, d’une part, et patrimoniales et civiques, d’autre part, ainsi que les facteurs qui influencent les conceptions et les pratiques de l’enseignement de l’histoire.

Arrimage entre les finalités. La première différence qui a attiré notre attention est la manière dont les enseignants arriment les finalités patrimoniales et civiques aux finalités intellectuelles et critiques. Mentionnons que ces dernières peuvent être nommées de manière différente, que ce soit en parlant de la pensée historienne, de la méthode historique, de l’esprit critique ou encore des compétences disciplinaires. Nous avons déjà précisé que la transmission de la mémoire et l’attachement à la nation font partie des représentations de la plupart des enseignants que nous avons rencontrés. À cela, nous devons ajouter que les finalités patrimoniales et civiques de l’enseignement de l’histoire ne s’opérationnalisent pas de la même façon chez chacun d’entre eux.

Parmi les enseignants rencontrés, seuls Jean, Paul, Maude et Steve ont discuté en détail du développement d’une forme ou d’une autre d’habiletés intellectuelles liées à l’histoire. Si les autres n’en ont pas parlé autant, on peut en déduire que cela ne fait pas partie de leurs priorités, sans pour autant supposer qu’ils n’y travaillent jamais en classe. Le développement d’habiletés intellectuelles a été évoqué par Jean au moment où nous avons discuté de l’épreuve unique de quatrième secondaire en histoire. Habituellement considérée comme une contrainte au sens où elle imposerait aux enseignants de présenter toutes les connaissances historiques prescrites, cette épreuve ne semble pas dicter le déroulement de l’enseignement de Jean. Celui-ci affirme vouloir d’abord rendre l’élève actif dans son apprentissage et développer chez lui certaines caractéristiques liées à la méthode historique. Cette approche est également visible dans sa vision du développement de l’identité de l’élève. Il soutient en effet qu’il vise à ce que l’élève construise sa propre identité au fil de ses enquêtes. Jean place ainsi la recherche par l’élève, et donc une forme de méthode historique, au cœur du processus d’apprentissage. Ce processus est étroitement lié à l’identité et à la nation puisqu’il désire que l’élève construise sa propre identité. Ainsi, les finalités patrimoniales et civiques ainsi que les finalités intellectuelles et critiques semblent coexister dans la conception que se fait Jean de l’enseignement de l’histoire.

Paul affirme ouvertement qu’il favorise l’adhésion de ses élèves à l’identité québécoise. Lorsqu’il décrit ses pratiques enseignantes, il évoque cependant certains éléments qui apparaissent contradictoires à cette conception de l’enseignement de l’histoire. Paul affirme en effet qu’une bonne partie de son enseignement repose sur le développement des concepts, ce qui suppose une démarche où l’élève est amené à réfléchir et à construire ses connaissances plutôt qu’à adhérer à un discours construit d’avance. Les données dont nous disposons ne nous permettent pas de vérifier si le discours de Paul se traduit dans la pratique ni quelle proportion de son enseignement repose sur la conceptualisation. Pour éviter de spéculer sur l’apparente contradiction entre ces deux aspects de l’enseignement de Paul, nous dirons que celui-ci tente d’accommoder deux finalités de l’enseignement de l’histoire. Il a, par contre, mis davantage l’accent sur l’adhésion à l’identité québécoise que sur le développement des concepts en affirmant, par exemple, que la quête identitaire québécoise est une question centrale dans son enseignement.

Au moment où nous avons rencontré Maude, elle poursuivait des études de deuxième cycle en didactique de l’histoire. Elle est donc au fait des recherches récentes dans le domaine et connait bien les différentes théories concernant le développement de la pensée et de la conscience historiques. Elle assure d’ailleurs que le développement de la pensée historienne fait partie des finalités qu’elle poursuit dans son enseignement. Elle affirme également qu’il est important de transmettre aux élèves la fierté d’être Québécois. Lorsqu’elle tente de faire la synthèse de son approche de l’enseignement de l’histoire, Maude soutient qu’elle fonde sa démarche sur la trame historique nationale et qu’elle y greffe le développement de la pensée historienne. Dans son cas, les finalités patrimoniales et civiques seraient prioritaires, mais laisseraient tout de même une place aux finalités intellectuelles et critiques.

Durant l’entretien, Steve a affirmé d’emblée que la formation de l’identité des élèves comme individus et comme membres d’une collectivité est au cœur de sa réflexion sur l’enseignement de l’histoire. Il soutient que son enseignement vise à amener les élèves à s’interroger sur leur identité et à réfléchir aux meilleures façons de façonner l’identité de la collectivité québécoise de demain. Il dit favoriser une adhésion critique à la nation québécoise. Steve cherche donc, lui aussi, à concilier l’identification à la nation et le développement d’habiletés intellectuelles proches de l’esprit critique. L’entretien révèle que, même s’il accorde une grande importance à l’appartenance au groupe national, il adopte tout de même une posture assez critique par rapport au concept de nation.

Nous remarquons donc que la moitié des enseignants rencontrés montrent un certain intérêt pour les finalités intellectuelles et critiques de l’enseignement de l’histoire. Il est également évident que chacun d’entre eux tente d’arrimer comme il le peut cette intention aux finalités patrimoniales et civiques. Dans certains cas, il est clair que le développement d’habiletés intellectuelles est secondaire ou complémentaire à la transmission préalable des principales connaissances. Considérant que l’autre moitié des participants n’a pas montré beaucoup d’intérêt pour les finalités intellectuelles et critiques, nous pouvons déduire que celles-ci n’apparaissent pas être au cœur des représentations des participants à notre étude. Qui plus est, lorsqu’elle fait partie des préoccupations des enseignants, elle est intégrée de manières fort différentes d’une personne à l’autre.

Sources des représentations sociales. L’autre élément qui nous semble varier grandement d’un enseignant à l’autre est la source de leurs représentations. Une partie significative de l’entretien vise en effet à les questionner sur les facteurs qui influencent le plus leur conception et leur pratique de l’enseignement de l’histoire. Nous leur avons d’abord demandé d’évoquer librement les facteurs les plus importants pour ensuite les questionner sur une série de facteurs prédéterminés. Nous avons clos cette partie de l’entretien en leur demandant de revenir sur leurs évocations libres après la discussion afin de vérifier s’ils changeaient leur réponse.

Nous notons une disparité significative dans l’importance de la formation universitaire. Pour Claude, dont la formation initiale était en économie, les apprentissages réalisés à l’université ajoutent une certaine dimension à son enseignement, mais ne sont pas un facteur dominant. Ce n’est pas à l’université qu’il a appris à devenir enseignant. Paul, qui a été initialement formé en informatique, semble tirer un peu plus d’inspiration de son parcours universitaire puisqu’il affirme utiliser fréquemment les technologies en classe. Enfin, Claudie, formée en géographie, s’inspire de ce bagage lorsqu’elle aborde certains aspects de l’histoire, mais retient surtout de son parcours une rigueur dans le travail. Elle est également plutôt critique du certificat en pédagogie qu’elle a réalisé après ses études de baccalauréat, affirmant qu’elle n’y a pas appris grand-chose d’utile pour sa pratique.

Parmi les enseignants qui ont suivi un parcours plus traditionnel, c’est-à-dire le volet sciences humaines du baccalauréat en enseignement secondaire, les avis sont également partagés. Steve, par exemple, a beaucoup retiré de sa formation initiale. Il dit s’inspirer de ces apprentissages, même plusieurs années après la fin de ses études. Il affirme avoir particulièrement bénéficié de l’enseignement des historiens avec lesquels il a été en contact durant son cheminement. À l’opposé, Daniel est plutôt critique de la formation reçue à l’université, seulement trois ans après l’avoir complété. Il estime qu’il a été mal préparé à la réalité du terrain et ajoute que plusieurs approches apprises à l’université sont impraticables dans un milieu comme le sien. Il affirme avoir mis presque complètement de côté les notions apprises à l’université au profit de l’expérience sur le terrain et des informations tirées des échanges avec ses collègues de travail.

Les autres enseignants que nous avons rencontrés ont suivi une formation de deuxième ou de troisième cycle en plus du baccalauréat en enseignement secondaire. Jean a complété une maitrise et commencé des études doctorales en histoire. Il soutient que cette formation lui apporte beaucoup, surtout en ce qui concerne sa compréhension de la discipline historique. Maude affirme avoir apprécié sa formation de premier cycle en enseignement, mais ajoute que c’est réellement à la maitrise qu’elle a poussé plus loin sa réflexion sur l’enseignement de l’histoire. Elle ajoute que tous les enseignants d’histoire devraient faire une maitrise. Véronique partage pour l’essentiel cet avis. Elle prétend avoir beaucoup appris en réalisant une maitrise à distance en didactique de l’histoire.

D’entrée de jeu, notre recherche visait à mesurer l’impact du programme de formation sur les pratiques enseignantes. Rappelons qu’une bonne partie du débat sur l’enseignement de l’histoire a tourné autour du texte du nouveau programme et de l’impact qu’il aurait sur l’enseignement réel de l’histoire du Québec. Or, les réactions à ce programme sont très variables. Pour Claude et Daniel, le programme de formation a un effet presque nul sur leur conception et leur pratique de l’enseignement de l’histoire. Ils sont très critiques de son approche et s’y réfèrent très peu lorsqu’ils planifient leur enseignement. Maude, également critique de plusieurs éléments du programme, a choisi d’organiser les contenus de formation d’une façon différente de ce qu’il prescrit.

Pour Steve, Paul et Jean par contre, l’implantation du Renouveau pédagogique a été l’occasion de renouveler leur façon d’enseigner en mettant davantage les élèves en action. Véronique a adopté l’approche par compétence du programme seulement parce qu’elle l’estimait compatible avec sa propre vision. Elle soutient qu’elle ne changerait pas sa méthode dans un futur programme si elle n’était pas en accord avec celui-ci. Quant à Claudie, elle perçoit l’épreuve ministérielle unique de quatrième secondaire comme une contrainte qui l’oblige à voir toute la matière prévue au programme. Pour elle, ce n’est pas une question de choix. Elle confirme cependant qu’elle enseignerait d’une tout autre façon si elle travaillait à un autre niveau.

Cette revue des divergences entre les participants concernant les facteurs qui influencent leur conception et leur pratique de l’enseignement de l’histoire révèle que les sources d’influence sont nombreuses et qu’un même facteur peut influencer de manière très différente les enseignants. Les réactions très variables à la formation initiale et au programme de formation illustrent bien qu’il est complexe et difficile d’exercer une influence durable sur les RS et les pratiques enseignantes.

Il nous apparait également clair que les personnes qui se destinent à l’enseignement de l’histoire au secondaire le font généralement parce qu’elles ont un intérêt marqué pour l’histoire et que cet intérêt nait dans des contextes très différents. La représentation de l’histoire et de la façon de l’enseigner serait ainsi ancrée chez les individus avant la formation initiale et la pratique professionnelle de l’enseignement de l’histoire. Il semble que les institutions comme les universités, le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur et les commissions scolaires peinent à imposer ou même à communiquer leur vision de l’enseignement de l’histoire du Québec. Les entrevues que nous avons menées indiquent que cette représentation demeure propre à chaque enseignant. Ce constat concorde avec les résultats de la recherche de Demers (2012) qui affirme que les croyances et perceptions des enseignants à propos des savoirs disciplinaires prennent forme dès le moment où ils sont élèves. Elle conclut également que la formation initiale ne semble pas transformer de manière durable ces croyances.

DISCUSSION

Notre recherche visait à identifier le noyau central des RS des enseignants d’histoire du Québec concernant les finalités de l’enseignement de l’histoire et la place qu’y tient l’identification à la nation. Il nous apparait clair que les finalités patrimoniales et civiques font partie du noyau central des RS des enseignants. Pour presque tous les enseignants que nous avons rencontrés, l’enseignement de l’histoire vise, entre autres, à situer les élèves dans une identité donnée, l’identité québécoise dans le cas qui nous intéresse.

Bien que les finalités intellectuelles et critiques soient présentes chez plusieurs des enseignants rencontrés, elles n’occupent pas une place centrale chez chacun d’eux et sont même absentes chez certains. En ce sens, ces finalités nous apparaissent périphériques puisqu’elles ne définissent pas fondamentalement la façon dont la majorité des participants à notre étude envisagent l’enseignement de l’histoire. Ceci dit, il est possible que ces finalités soient centrales pour un certain nombre d’enseignants. Dans ce cas, on pourrait soumettre l’hypothèse que des RS concurrentes coexistent au sein du groupe des enseignants d’histoire du Québec.

Nous nous étions également fixé comme objectif d’identifier des sources d’influence des RS et plus particulièrement de cerner l’influence du programme de formation. Or, il appert que celui-ci exerce une influence limitée sur les RS des enseignants. La plupart des enseignants rencontrés affirment prendre connaissance du programme, mais seulement trois d’entre eux (Paul, Steve et Jean) ont affirmé s’en inspirer concrètement pour planifier leur enseignement. En revanche, ils tirent leur inspiration d’un vaste éventail de sources comme les échanges avec les collègues, les stagiaires ou la formation initiale. Il ne semble pas émerger de facteur dominant des possibilités que nous avons abordé avec les participants.

Combinée à la force des finalités patrimoinales et civiques, la relative faiblesse de l’influence du programme de formation sur les RS des enseignants indique que la crainte de voir la place de la nation dans l’enseignement de l’histoire s’éroder sous l’impulsion du programme de 2007 est plus ou moins fondée. Les enseignants que nous avons rencontrés continuent d’accorder de l’importance à la fonction d’identification à la nation, malgré ce que peut en dire le programme de formation.

Notre recherche jette une certaine lumière sur des phénomènes peu explorés jusqu’ici, mais elle découvre également de nouvelles zones d’ombre et soulève des questions. Au premier chef, il nous semble primordial d’explorer davantage les pratiques enseignantes. Nous savons que les RS ont une portée dans l’action, mais il est difficile de dresser un portrait complet de l’identification nationale dans l’enseignement de l’histoire depuis l’implantation du nouveau programme en se basant uniquement sur les pratiques déclarées. Des observations en classe permettraient de mieux comprendre la portée des RS sur la pratique enseignante.

Tout au long des entrevues, nous avons eu l’impression distincte que plusieurs enseignants sont à la recherche d’un certain accord entre les diverses finalités de l’enseignement de l’histoire. Ce qui apparait de l’extérieur comme une incohérence pourrait être, en fait, la recherche d’un équilibre. Nous pensons notamment à Steve, qui place l’identité québécoise au cœur de son enseignement, mais qui vise une construction critique de l’identité. À l’instar de Bouchard (2013), les enseignants sont peut-être à la recherche d’une troisième voie entre l’attachement identitaire et le développement de la méthode historique. En ce sens, le débat polarisé sur l’enseignement de l’histoire du Québec, tel qu’il a été mené jusqu’à maintenant, ne nous apparait pas fournir beaucoup d’éléments pertinents pour mieux comprendre comment les enseignants composent avec les différentes finalités de l’enseignement de l’histoire.

Au moment où de nouveaux débats prennent l’espace public d’assaut à propos des vertus et des limites du prochain programme d’histoire, notre recherche rappelle que les enseignants sont les maitres d’œuvre de ce programme et qu’ils font résolument partie de la société dans laquelle ils enseignent. L’expérience et la recherche montrent qu’on devrait s’attendre à ce qu’ils enseignent comme tel.

NOTES

  1. 1. Nous tenons à remercier chaleureusement notre directeur de recherche, Marc-André Éthier, qui nous a accompagné et guidé tout au long de cette recherche. Merci également à Gérard Bouchard, qui a guidé notre recherche en ce qui concerne le concept de nation.
  2. 2. Ironiquement, la situation est inversée dans le débat qui entoure l’introduction du cours d’Histoire du Québec et du Canada. Certains groupes, comme les anglophones et les Autochtones, estiment qu’ils ne sont pas suffisamment ni correctement représentés dans le nouveau programme (La Presse canadienne, 2016).
  3. 3. Pour certains intervenants comme Laville (1984), la perspective nationale de l’enseignement de l’histoire est contraire à une approche dite scientifique de l’histoire et de son enseignement.
  4. 4. « The kind of history that has the most influence on the life of the community and the course of events is the history that common people carry around in their heads. »
  5. 5. La recherche complète comporte en fait une phase qualitative et une phase quantitative.
  6. 6. Le domaine d’apprentissage de l’univers social s’apparente aux sciences humaines. Il regroupe les disciplines de l’histoire, de la géographie et un cours intitulé Monde contemporain qui aborde des enjeux internationaux liés à la politique et à l’économie.
  7. 7. Pour un compte rendu détaillé de chaque entretien et pour les résultats de la phase quantitative de la recherche, consulter la thèse en ligne (Lanoix, 2015) : https://papyrus.bib.umontreal.ca/xmlui/handle/1866/13508

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Annexe A

Schéma d’entrevue

Les représentations sociales des enseignants concernant la fonction identitaire de l’enseignement de l’histoire.

Ouverture

Vous êtes enseignant (e) d’histoire et éducation à la citoyenneté ici, à l’école... et vous avez accepté de participer à cette recherche sur les pratiques enseignantes en histoire et éducation à la citoyenneté au deuxième cycle du secondaire.

Votre participation à cette recherche nous permettra de mieux comprendre les liens qui existent entre le programme de formation et l’enseignement réel de l’histoire en ce qui concerne l’identification à la nation.

Les propos échangés aujourd’hui sont confidentiels. Je serai le seul à avoir accès à ces données. Un nom fictif vous sera assigné, votre école et la commission scolaire au sein de laquelle elle se situe ne seront pas identifiées et il sera impossible pour quiconque lisant la thèse de vous identifier personnellement.

Avez-vous déjà participé à une entrevue de ce type ?

Je vais vous poser des questions ouvertes sur les finalités que vous poursuivez dans votre enseignement de l’histoire. Vos opinions, vos croyances, vos valeurs et vos intentions sont sollicitées dans vos réponses. Sentez-vous à l’aise de répondre de la façon qui vous convient le mieux. Il se peut que je vous pose de temps à autre des sous-questions, afin de m’assurer que j’ai bien saisi votre réponse.

Consentez-vous à l’enregistrement de notre entretien ?

Questions principales

    1. Quelles devraient être les finalités de l’enseignement de l’histoire selon vous ?

    2. Est-ce que le programme de formation actuellement en vigueur correspond à ces finalités ?

    3. En pratique, comment travaillez-vous à atteindre ces finalités ?

    4. Avez-vous suivi le débat sur l’enseignement de l’histoire du Québec dans les médias au cours des derniers mois ?

    5. Qu’en pensez-vous ?

    6. Est-ce que les arguments avancés par l’un ou l’autre des participants au débat vous ont incité à remettre en question certaines de vos pratiques ?

    7. Durant ce débat, il a fréquemment été question de la transmission de l’histoire nationale. Croyez-vous que l’enseignement de l’histoire joue un rôle dans la transmission du passé et des valeurs nationales ?

    8. Qu’est-ce qu’une nation selon vous ?
Est-ce que le Québec forme une nation selon vous ? Pourquoi?

    9. Est-ce que l’enseignement de l’histoire devrait avoir comme objectif de contribuer à la transmission du passé et des valeurs de la nation ? Pourquoi ?

    10. Dans les faits, croyez-vous que l’enseignement de l’histoire contribue à la transmission du passé et des valeurs de la nation ? Pourquoi ?

    11. Considérez-vous que votre pratique enseignante est influencée par l’idée de créer un certain attachement à la nation chez l’élève ? Pourquoi ?

    12. Si vous avez enseigné l’histoire au deuxième cycle du secondaire avant l’implantation du programme actuel, est-ce que le nouveau programme vous a incité à apporter des changements à votre enseignement ? Précisez.

    13. Quels sont les facteurs les plus importants qui influencent votre enseignement ?

Clôture

14. Aimeriez-vous ajouter quelque chose ?


15. Y a-t-il une question que vous auriez aimé que je vous pose ?

16. Êtes-vous satisfait de notre entretien ?

Remerciements

Je tiens à vous remercier vivement de votre disponibilité pour cet entretien et d’avoir partagé avec moi votre vision de la situation. Elle me sera indispensable pour décrire les divers éléments des pratiques enseignantes en histoire et éducation à la citoyenneté au Québec.