LE CONCEPT DE REPRÉSENTATIONS PROFESSIONNELLES : L’EXEMPLE DES PRÉCEPTRICES SAGES-FEMMES



JOSÉE LAFRANCE Université du Québec à Trois-Rivières



La reconnaissance officielle de la profession de sage-femme en 1999 au Québec a constitué une étape majeure dans l’histoire de cette « pratique ancestrale » (Bergeron, 2003, p. 141). L’instauration simultanée de la pratique dans le réseau de la santé, de la profession dans le système professionnel du Québec et de la formation selon un cadre universitaire a obligé les sages-femmes à débattre de sujets clés pour leur profession. Ainsi, les sages-femmes ont construit leurs représentations de la profession et de la formation.

La formation permet de fournir une main d’œuvre de professionnelles hautement qualifiées. Au Québec, la formation des sages-femmes s’étend sur quatre années universitaires et se déroule majoritairement en milieu de pratique auprès de sages-femmes préceptrices (superviseures de terrain).

Les préceptrices ont un impact direct sur le développement de la future professionnelle en tant que personne, sur sa conceptualisation des situations cliniques et sur ses habiletés d’intervention auprès de la clientèle (Bernard et Goodyear, 2014). La préceptrice donne le ton non seulement à l’expérience clinique de la stagiaire, mais encore à sa façon de se représenter la profession en tant que choix de carrière (O'Connor, 2015). Le préceptorat influence donc grandement le devenir professionnel d’une étudiante (Hughes et Fraser, 2011). Le préceptorat est généralement considéré comme complexe (Agbakoba Ssengabadda, 2016), car il allie à la fois l’enseignement à la stagiaire, l’évaluation de ses activités professionnelles, ainsi que simultanément les soins et services aux femmes et à leur famille.

Puisqu’il n’existe pas d’étude au sujet du préceptorat ni de la formation des sages-femmes au Québec, il serait pertinent d’utiliser un concept pour témoigner de l’action et de la pensée professionnelles. L’examen des représentations professionnelles se présente alors comme un outil privilégié (Piaser, 2000).

Le but de ce texte est de faire connaitre aux professionnelles qui contribuent à la formation en milieu de pratique, le concept de représentations professionnelles à partir de l’exemple du préceptorat dans la formation des sages-femmes. Sont ainsi présentés un bref aperçu de la formation des sages-femmes au Québec et la notion de représentations professionnelles, ses fonctions, son contenu et ses niveaux d’analyse.

APERÇU DE LA FORMATION PRATIQUE DES SAGES-FEMMES

Concomitante à la légalisation de la pratique sage-femme au Québec, la formation initiale est offerte exclusivement par l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) depuis 1999. Les bachelières de l’UQTR accèdent directement au permis de pratique de l’Ordre des sages-femmes du Québec (OSFQ). Compte tenu de ce passage direct, l’université est redevable à la société québécoise et se doit d’attester que les diplômées en pratique sage-femme rencontrent toutes les exigences liées à l’exercice de la profession. Ainsi, l’évaluation des apprentissages des étudiantes en cours de formation constitue un mécanisme de contrôle de qualité professionnelle et de protection du public à l’égard des mères et des nouveau-nés qui seront suivis par ces sages-femmes (Rooke, 2014; UQTR, 2006).

Le programme de baccalauréat en pratique sage-femme (BPSF) cumule 1005 heures de cours théoriques et 2352 heures de stage. Cette proportion d’heures de formation pratique – ici de 70% – est d’ailleurs supérieure aux normes internationales de formation des sages-femmes qui indiquent que le volet pratique doit constituer au moins 50% des heures d’un programme de formation initiale (Confédération internationale des sages-femmes, 2013). Les stages en milieu de pratique permettent à l’étudiante d’intégrer la théorie et la pratique, de développer sa pensée critique, ses habiletés techniques et son sens de l’éthique (O'Connor, 2015). Ces stages sont une composante centrale de l’apprentissage des étudiantes et de leur socialisation à la profession de sage-femme (Carlon, 2016).

Au BPSF, l’étudiante effectue cinq stages de 14 semaines chacun, auprès de sages-femmes préceptrices et forment alors une dyade. L’étudiante développe progressivement ses connaissances, ses habiletés et ses attitudes requises à l’exercice professionnel. En effet, la séquence des cinq stages prévoit que l’étudiante débute par de l’observation et qu’elle s’intègre aux activités professionnelles de la préceptrice, d’abord à un niveau de débutante, ensuite qu’elle progresse vers un niveau intermédiaire d’implication active et finalement, lors du cinquième stage, qu’elle démontre sa capacité à agir de façon autonome, responsable et sécuritaire.

La dyade stagiaire-préceptrice est encadrée par une professeure de l’université, formant ainsi une triade. Le modèle de la triade lors des stages se retrouve aussi en enseignement primaire et secondaire au Québec. Les deux formatrices accompagnent la stagiaire et évaluent ses apprentissages, l’enseignante associée le fait au quotidien tandis que la superviseure universitaire le fait ponctuellement (Correa Molina, Gervais et Rittershaussen, 2008). Lors des évaluations formelles, les échanges en triade favorisent la construction de sens pour les savoirs professionnels à partir des expériences vécues (Tominska, Dobrowolska et Balslev, 2017). Ce modèle existe dans de nombreux pays; par exemple, au Canada dans plusieurs programmes universitaires en sciences de la santé et en éducation (Ralph, Walker et Wimmer, 2009), en Australie et en Belgique en enseignement (Ambrosetti, 2010; Carlier, 2009) et dans l’Union européenne en sciences infirmières (Jokelainen, Turunen, Tossavainen, Jamookeeah et Coco, 2011). Que ce soit en enseignement ou en pratique sage-femme, les deux formatrices de la triade travaillent ensemble pour accompagner l’étudiante et faire l’évaluation de ses apprentissages, tout en apportant une perspective professionnelle à son expérience pratique (Correa Molina et al., 2008; Confédération internationale des sages-femmes, 2013). Selon un tel modèle, la stagiaire bénéficie d’une formation en cohérence avec la réalité de terrain et l’ensemble des objectifs de formation. L’évaluation en triade augmente même les habilités de l’étudiante à mobiliser ses connaissances dans la pratique (Collington, Mallik, Doris et Fraser, 2012). Ainsi, cette approche en triade semble bien préparer les étudiantes sages-femmes à l’exercice de la profession, car elle réduit l’écart entre la théorie et la pratique et facilite la transition vers la réalité professionnelle (Doughty, Harris et McLean, 2007). Le modèle de la triade contribue à la socialisation professionnelle (Ralph et al., 2009).

LE CONCEPT DE REPRÉSENTATIONS PROFESSIONNELLES

Le concept de représentations professionnelles a été utilisé pour des études en lien avec des professions associées à l’enseignement (Genolini et Tournebize, 2010; Michel-Guillou, 2010; Talbot et Arrieu-Mutel, 2012), les sciences infirmières (Jouanchin, 2010; Lheureux, 2010; Maillet-Contoz, Combaz et Morin-Messabel, 2019) et les professions reliées à la santé mentale (Lalande, 2018; Porterie, 2014). Ce concept porte spécifiquement sur des objets importants pour un groupe professionnel et utiles à l’exercice de l’activité professionnelle (Martin, Morcillo, Jeunier et Blin, 2005).

Le concept de représentations professionnelles découle de la notion de représentations sociales attribuée à Moscovici, mais cible spécifiquement l’univers professionnel (Bataille, Blin, Jacquet-Mias et Piaser, 1997; Martin et al., 2005). Pour analyser les activités d’un champ professionnel, la notion de représentations sociales s’est avérée insuffisante puisque trop générale et limitée à des situations sociales (Blin, 1997; Piaser, 2014). En effet, il s’agit d’un savoir populaire dit naïf « parce qu’il se construit en marge du savoir des experts » (Deschamps et Moliner, 2012, p. 142). Les représentations sociales se construisent et se diffusent par la communication entre les individus d’un groupe (Doise, 1985; Rouquette et Rateau, 1998). Les échanges verbaux portent souvent sur une activité réelle pour le groupe, sur des pratiques (Abric, 2001; Tyrlik et Macek, 2002). Les représentations sociales véhiculent l’histoire et la culture de ce groupe et s’inscrivent donc dans un contexte (Abric, 2001). Prises hors contexte, elles deviennent éthérées et perdent leur sens ou leur vérité sociale (Mannoni, 2012). Ainsi, les représentations sociales prennent du temps à se construire et à se traduire dans le discours des gens. Lorsqu’il s’agit du monde professionnel, la vision fonctionnelle des représentations sociales a amené la notion de représentations professionnelles (Piaser, 2014).

À la fin des années 1990, des chercheurs de l’Université de Toulouse constatent que pour travailler spécifiquement sur la compréhension du monde professionnel, les représentations professionnelles sont plus spécifiques que les représentations sociales. Même si les représentations professionnelles sont sociales, les personnes concernées ne peuvent être que celles exerçant cette profession (Bataille, 2000; Fraysse, 1997). Par exemple, la représentation que les journalistes ont de la pratique sage-femme est une représentation sociale d’une profession et non pas une représentation professionnelle.

L’utilisation du concept de représentations professionnelles permet de saisir le savoir particulier d’un groupe de professionnelles – pas le savoir de sens commun, ni le savoir strictement scientifique – tout près des réalités du quotidien professionnel (Blin, 1997). Les connaissances scientifiques, tout comme celles techniques, pratiques, relationnelles, expérientielles, organisationnelles et institutionnelles contribuent à ce savoir particulier (Bataille et al., 1997; Lheureux, 2010; Michel-Guillou, 2010). Ainsi, une des spécificités des représentations professionnelles est que les objets de ces représentations sont très près des membres de la profession, puisque les connaissances et les pratiques sont spécifiques et de niveau élevé (Bataille, 2005). Les objets des représentations professionnelles sont nécessairement bien connus des acteurs (Bataille, 2000). Par exemple, un objet de représentation professionnelle pour les sages-femmes est l’accouchement physiologique, puisqu’il requiert des savoirs, un savoir-être et un savoir-faire développés tout au long de la formation et raffinés au fil des expériences professionnelles.

Les représentations professionnelles se formeraient durant la professionnalisation qui débute pendant la formation (Bataille, 2000; Jouanchin, 2010). Elles revêtent un aspect temporel pour leur conceptualisation et requièrent une période d’appropriation pour les actrices de la profession, un certain « dépôt historique » (Moscovici, 2000, p. 15). La progression des exigences de stage au sein du BPSF favorise ce dépôt historique pour la future sage-femme.

Les représentations professionnelles se définissent donc comme des représentations élaborées dans l’action et la communication professionnelles qui les contextualisent, par des actrices appartenant à des groupes professionnels, en rapport avec des objets pertinents et utiles pour l’exercice de l’activité professionnelle (Bataille, 2000; Blin, 1997).

Fonctions

Les représentations professionnelles portent spécifiquement sur des objets importants pour un groupe professionnel dans leurs pratiques et utiles à l’exercice de l’activité professionnelle (Jouanchin, 2010; Martin et al., 2005). Cette spécificité se retrouve d’ailleurs dans les quatre fonctions essentielles des représentations professionnelles qui découlent de celles classiquement attribuées aux représentations sociales : fonctions cognitive, identitaire, d’orientation et justificatrice. La synthèse suivante au sujet des fonctions essentielles s’inspire des écrits de Abric (2001), Bataille et al. (1997), Blin (1997), Giroux et Garnier (2001) et Piaser (2014).

La fonction cognitive fait référence au savoir professionnel produit dans le contexte de l’activité professionnelle. Elle permet aux membres du groupe de bien connaitre les objets reliés à l’exercice professionnel. En plus de procurer des connaissances nécessaires à l’exercice d’une profession, les représentations professionnelles constituent la base de la communication entre les membres du groupe. Ainsi, le cadre de référence que les membres comprennent et le vocabulaire commun qu’elles utilisent facilitent la communication. Par exemple, la compétence de « planifier l’accouchement » (OSFQ, 2009, p. 50) fait appel à un large éventail de connaissances et réfère à des pratiques que les sages-femmes n’ont pas besoin de s’expliquer lorsqu’elles en parlent, mais qui demandent d’être apprises par une étudiante.

Par leur fonction identitaire, les représentations professionnelles définissent et protègent l’identité spécifique de la profession. Cette fonction permet d’ailleurs à chaque actrice de s’identifier comme membre de sa profession. La détention d’un titre contrôlé par un ordre professionnel, comme le titre de sage-femme contrôlé par l’OSFQ, fait partie de la fonction identitaire. Les membres se reconnaissent entre elles et sont reconnues par les gens qui n’exercent pas la profession. L’identité se construit dans la socialisation professionnelle, notamment pendant la formation. Les représentations professionnelles permettent à l’identité du groupe de se nuancer au fil du temps et des contextes, mais sur une base pérenne. Par exemple, l’accouchement fait partie du champ de pratique des sages-femmes, mais ne se pratique pas nécessairement de la même façon d’une époque à l’autre ou en fonction du type de professionnelles (p. ex. sage-femme, médecin).

La fonction d’orientation concerne les conduites professionnelles. Les représentations professionnelles guident les pratiques a priori, avant l’action. Elles orientent les choix de ce qui doit être fait en fonction des normes et des règles professionnelles, notamment dans des situations nouvelles. Elles ont ainsi une valeur prescriptive. Par exemple, lorsqu’une préceptrice accueille une étudiante en début de stage et lui fait part des modes de fonctionnement et des conduites à tenir qu’elle devra respecter dans le milieu.

Par leur fonction justificatrice, les représentations professionnelles permettent d’expliquer et de justifier des pratiques a posteriori. Elle légitime des conduites professionnelles et des prises de position après les évènements. Les représentations professionnelles peuvent être invoquées pour justifier une action. Par exemple, une sage-femme pourrait justifier qu’elle n’a pas prescrit un test de dépistage génétique à une femme enceinte parce que cette dernière refusait cette investigation, en toute connaissance de cause. La sage-femme a fondé son action sur les normes professionnelles stipulant qu’elle doit respecter les décisions de la femme tout en s’assurant qu’elle donne l’information disponible pour lui permettre de faire des choix éclairés (OSFQ, 2021).

Contenu

Le contenu des représentations professionnelles s’organise suivant trois dimensions : la dimension fonctionnelle, la dimension identitaire et la dimension contextuelle. Chaque dimension est présentée ci-après, à partir des écrits de Blin (1997), Martin et al. (2005) et Michel-Guillou (2010). Repérer le contenu permet de rendre ce concept opérant.

La dimension fonctionnelle des représentations professionnelles fait référence aux pratiques. Elle comprend les « objets susceptibles d'être activés dans l'exercice de l'activité professionnelle » (Blin, 1997, p. 91). Ce sont les objets signifiants de la pratique. Autrement dit, dans la dimension fonctionnelle se retrouvent les éléments indispensables à la réalisation d’une tâche. Dans le cas des préceptrices sages-femmes, les pratiques d’évaluation de l’activité professionnelle de la stagiaire font partie de cette dimension.

La dimension identitaire correspond à l’identité, au rôle, autant du groupe que de la personne. Elle porte sur des éléments de l’idéal professionnel et du soi professionnel. Les éléments associés à l’idéal professionnel tiennent des missions essentielles de la profession et des compétences requises pour l’exercer. Les éléments liés au soi professionnel s’apparentent aux qualités nécessaires dans cette profession et aux motivations de la personne. Le rôle qu’adopte la préceptrice auprès de la stagiaire sage-femme fait partie de cette dimension. Le rôle exprime l’identité professionnelle (le sens de soi) et l’intention (ses motivations) sous-jacentes aux pratiques de la préceptrice. Par exemple, une préceptrice pourrait s’identifier davantage dans un rôle d’accompagnante de la stagiaire plutôt que dans un rôle de juge.

La dimension contextuelle prend en compte « les conditions réelles d’exercice des activités » (Blin, 1997, p. 61). Le contexte recouvre à la fois le cadre, l’organisation et l’institution. Le cadre des activités correspond à la situation dans laquelle se déroulent les activités professionnelles. Il désigne les structures temporelles et spatiales dans lesquelles s’inscrivent les actions et les interactions. L’organisation correspond aux statuts des actrices (p. ex. : préceptrice, stagiaire), à l’équipe de travail élargie et à l’établissement (p. ex. : maison de naissance, université). Boutanquoi (2014) explique que l’organisation réfère simultanément à un lieu formel et à une structure de fonctionnement. S’y retrouvent alors aussi les ressources disponibles et le climat de travail. Conséquemment, l’institution (p. ex. l’UQTR) véhicule des valeurs et oriente les pratiques de stage en fonction des finalités qu’elle cible. L’institution pourrait aussi correspondre à un milieu de stage. La nature de la relation entre la préceptrice et la stagiaire, leur climat de stage illustre la dimension contextuelle.

Niveaux d’analyse

Pour rendre opérant le concept de représentations professionnelles, notamment en recherche, Blin (1997) propose quatre niveaux d’analyse. Cette démarche en quatre niveaux reprend essentiellement les étapes de l’analyse de verbatim mises de l’avant en recherche qualitative, par des auteurs tels Creswell (2014), Miles, Huberman et Saldana (2014), ainsi que Paillé et Mucchielli (2012).

La première étape consiste au repérage des contenus, soit la préparation des données et la codification. C’est la description des différents éléments portant sur les objets signifiants pour les activités professionnelles, soit les pratiques, l’identité professionnelle et le contexte. Il peut s’agir, par exemple pour la préceptrice sage-femme, de l’organisation du travail avec la stagiaire, du lien avec l’UQTR, de l’évaluation, etc.

La deuxième étape est la description du référentiel professionnel, soit la création de thèmes ou de catégories. Le référentiel professionnel ne revêt pas le sens de référentiel d’activité professionnelle ou de compétences, mais s’apparente aux invariants qui se dégagent de l’analyse. Il s’agit de repérer ces invariants en créant des catégories pouvant être ensuite regroupées en grandes catégories.

La troisième étape est l’analyse structurale, soit l’interrelation des thèmes. Par exemple, l’inventaire des pratiques est analysé tant du point de vue interne (p. ex. : accompagnement, régulation des apprentissages) que du point de vue externe (p. ex. : directives institutionnelles, lois). De cette analyse des représentations des pratiques évoquées par les préceptrices, le rôle qui se dégage de leur discours est mis en lumière. Les relations liant tous ces éléments (pratiques et rôle) peuvent être mises en évidence sous forme de matrice ou d’arbre thématique.

Pour le quatrième niveau, la contextualisation des analyses, la chercheuse interprète le sens et donne des explications. Il s’agit de contextualiser l’ensemble des dimensions fonctionnelle et identitaire.

CONCLUSION

La formation universitaire des sages-femmes au Québec est constituée majoritairement de stages en milieux de pratique, auprès de préceptrices. Ces dernières occupent une place primordiale dans l’encadrement et le devenir des étudiantes. Pour comprendre le préceptorat, le concept de représentations professionnelles s’avère particulièrement pertinent. Découlant de la notion de représentations sociales, le concept de représentations professionnelles se définit comme des représentations élaborées dans l’action et la communication professionnelles qui les contextualisent, par des actrices appartenant à des groupes professionnels, en rapport avec des objets pertinents et utiles pour l’exercice de l’activité professionnelle. Il sert de lunette d’approche, notamment pour circonscrire les pratiques et identifier le rôle qu’adoptent des préceptrices sages-femmes. Pour ce faire, l’analyse des représentations professionnelles débute par le repérage de contenu. Ce contenu s’opérationnalise en une dimension fonctionnelle, une dimension identitaire et une dimension contextuelle. L’analyse permet ensuite de progresser jusqu’à une compréhension globale et contextualisée des préceptrices sages-femmes ou de toute autre professionnelle. Puisque plusieurs programmes de formation universitaire en sciences de la santé et en sciences de l’éducation sont constitués en partie de stages pour le développement de compétences professionnelles, ce texte pourrait contribuer à l’avancement des connaissances aussi dans d’autres disciplines.

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