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apports de la perspective énactive dans les formations universitaires professionnalisantes au QUÉBEC



MARIA DEL CARMEN GRULLON CARVAJAL, CARINE NASSIF-GOUIN, NATHALIE S. TRÉPANIER, MARIE (AURÉLIE) THÉRIAULT et FRANCISCO LOIOLA Université de Montréal


Au Québec, les universités proposent différents programmes destinés aux adultes dont certains répondent à des agréments ou des « habilitations ». Ces programmes doivent intégrer les exigences du code des professions ou celles prévues dans la loi-cadre spécifique (Gouvernement du Québec, 2006). Ces formations sont principalement conçues à partir de compétences professionnelles bien définies que doivent développer tous les étudiants. À titre d’exemples, nous pouvons citer plusieurs formations initiales comme celles en sciences infirmières, en administration ou encore en ingénierie. Si d’autres programmes universitaires ont pour objectif d’être professionnalisants ou qualifiants, ceux-ci ne sont pas pour autant soumis à des agréments, c’est-à-dire, à une reconnaissance curriculaire de formations professionnelles décernées par un organisme indépendant nécessaire pour être sanctionnées par un diplôme délivré par le ministère de l’Éducation. En l’absence d’ordre professionnel, ce sont les institutions qui fixent les exigences de réussite, comme pour la formation initiale des maîtres en éducation. Dans un tel contexte, «  le terme de professionnalisation renvoie aux processus d’acquisition de compétences spécifiques liées l’activité exercée » (Artois, 2014, p. 6). On pourrait alors soutenir que le développement de compétences de l’étudiant vise des transformations pertinentes et transférables à la pratique professionnelle chez l’individu, au fil de son activité.


Selon Barbier et Wittorski (2005, p. 65), il peut y avoir une professionnalisation des individus, des organisations, des activités ou encore des formations. Cette distinction renvoie à ce qu’on entend par un métier, technique ou mécanique, et une profession qui nécessite un savoir savant acquis sur les bancs universitaires. La vision anglo-saxonne classique associe la notion de professionnalisation à l’université, lieu de production, de rationalisation et de diffusion des savoirs de haut niveau. Wittorski (2008, p. 16) rappelle que la définition fonctionnaliste de la professionnalisation se conçoit comme étant une « spécialisation du savoir, une formation de haut niveau et un idéal de service ». Il identifie trois types d’intention de professionnalisation, soit comme un processus se déployant dans une société donnée, une organisation, ou encore un milieu de formation. C’est ce troisième type d’intention que nous retiendrons ici, puisqu’il s’agit d’un processus par lequel des dispositifs de formation assurent un ancrage plus intime entre les milieux universitaires et le travail. Les enjeux de la professionnalisation sont liés, entre autres, aux composantes, à la légitimité de pratiques et à la conception de la formation. Cette perspective s’inscrit dans le courant des fonctionnalistes, pour lesquels la professionnalisation est associée à un service idéal à atteindre, une formation longue à l’université accompagnée de savoirs complexes ou scientifiques et une profession. Dans un tel contexte éducatif, la question des activités d’apprentissage visant la professionnalisation se pose, notamment par le fait que ces activités favorisent elles-mêmes des apprentissages et produisent des savoirs nouveaux. Ce faisant, elles s’insèrent dans une perspective conjointe de la formation et de la professionnalisation de chacun des acteurs (Champy-Remoussenard, 2005, p. 37), soit l’étudiant et le professeur, lequel est très souvent un professionnel en exercice.

En ce sens, l’énaction propose de percevoir l’activité humaine comme étant autonome, une totalité incarnée et incorporée, radicalement et dynamiquement située, et un processus de création et d’attribution de sens (Varela et coll., 1993; Poizat et coll., 2013). L’activité est alors définie comme un flux incessant et dynamique où la cognition émerge de la constante interaction entre l’étudiant et son environnement social et physique (Poizat et coll., 2013; Varela et coll., 1993). En d’autres termes, la dyade étudiant-environnement se transforme mutuellement et incessamment. Les apprentissages émergent alors de ce couplage en fonction de ce qui est significatif pour l’étudiant, et c’est pourquoi il est qualifié d’asymétrique (Poizat et Durand, 2015; Sève et coll., 2012). Il est alors considéré que les connaissances émergent dans le flux d’actions et d’activités à travers les interactions réalisées en salle de classe.

Cette contribution tente d’apporter quelques pistes de réflexion sur l’apport de l’énaction aux formations professionnalisantes où chaque acteur, le professeur et l’étudiant, jouent un double rôle de formateur et d’apprenant par l’exploration de l’activité humaine telle que conceptualisée dans le paradigme de la cognition vécue et incarnée (Varela et coll., 1993; Zorn, 2011). Dans ce cadre, nous tenterons de participer à la réflexion scientifique sur l’activité humaine selon une approche énactive en illustrant nos propos par quelques exemples d’applications de l’énaction en formation professionnelle universitaire, et ce, après avoir présenté les trois premières phases de l’anasynthèse puis le cadre conceptuel de l’énaction appliquée en éducation.

MÉTHODOLOGIE DE RECHERCHE


Notre essai propose de circonscrire la formation professionnalisante des adultes en contexte universitaire sous la perspective énactive comme étant notre objet de recherche. Il relève ainsi d’une méthode de recherche qualitative de type exploratoire (Trudel et coll., 2007).

Un recensement général non exhaustif des écrits de type scoping review a été réalisé. Les descripteurs utilisés sont : formation (professionnelle et universitaire), activité humaine, conception / développement de formation et énaction. Le corpus est composé d’articles scientifiques, d’essais et d’ouvrages fondateurs provenant de la littérature grise, c’est-à-dire de la littérature scientifique et extrascientifique, appelée plus communément littérature grise (Thuderoz et Girard-Héraud, 2000). Ainsi, ces ouvrages sont retenus lorsque la source ou les rapports sont considérés d’intérêt dans le domaine ou qu’ils permettent d’étayer des théories à l’appui d’illustrations et de situations concrètes.

Pour procéder à l’analyse du contenu, nous avons privilégié celle de l’anasynthèse (Legendre, 2005; Messier et Dumais, 2016) en classifiant les éléments formels, axiologiques, praxiques et explicatifs des textes recensés portant principalement sur les concepts d’énaction et de formations universitaires professionnalisantes. L’anasynthèse se définit comme un «  processus général d’élaboration d’un modèle  » (Legendre, 2005, p. 74), et consiste en un processus itératif et incrémental composé de sept étapes (voir figure 1 ).








Figure 1. Représentation générale de l’anasynthèse (legendre, 2005)

Dans cette étude, nous avons retenu les trois premières étapes de la méthode, soit a) la création du corpus (l’ensemble de départ), b) l’analyse de cet ensemble et c) la rédaction de la synthèse à partir de celui-ci (voir Tableau 1) telles que définis par Messier et Dumais (2016). En effet, seuls les critères de scientificité relatifs à la mise en œuvre d’un prototype ou d’un modèle théorique ne sont pas considérés puisque nous ne nous inscrivons pas ici dans un tel cadre.

Tableau 1. Critères de scientificité pour la recherche théorique et leur opérationnalisation dans l’anasynthèse (Messier et Dumais, 2016, p. 60)






















L’ensemble de départ se compose du corpus dérivant de la recension générale décrite précédemment. La méthode suivie pour l’analyse de l’ensemble de départ consiste en la classification des segments d’éléments formels, axiologiques, praxiques et explicatifs des textes retenus portant principalement sur les concepts d’énaction et de formations universitaires professionnalisantes. La synthèse qui fait suite à l’analyse de contenu a permis de concevoir le cadre conceptuel que nous présentons ici afin d’expliciter les présupposés de l’énaction par l’analyse de l’activité humaine selon une perspective énactive. Cette étape a été menée de manière à rassembler et à structurer les données recueillies, les éléments des textes, afin d’identifier les éléments essentiels, leurs cohérences et leurs incohérences, ainsi que les relations qui les unissent et forment les données (Legendre, 2005) relatives au rapprochement de la formation et du milieu de travail.



CADRE CONCEPTUEL DE L’ACTIVITÉ HUMAINE SELON UNE APPROCHE ÉNACTIVE

L’énaction s’enracine dans la biologie du vivant et met l’accent sur l’expérience vécue et incarnée par l’acteur, se distinguant ainsi du cognitivisme. En effet, ce dernier résulte de la théorie computationnelle fondatrice des sciences cognitives (Gardner, 1993; Varela, 1996) et se focalise sur des représentations mentales et des raisonnements. Selon la conception cognitiviste, les modes de pensée tels que la déduction, l’inférence et l’abduction définissent des processus de raisonnement qui aboutissent à de nouvelles connaissances précises et guidées de l’extérieur (Collot, 2012). Dans une perspective cognitive, l’étudiant acquiert des connaissances déterminées et conformes en suivant l’un des processus de raisonnement qui lui est imposé par le professeur. Transposé à la formation professionnalisante, l’environnement de formation est conçu de manière à refléter la «  réalité  » du terrain et à reproduire les gestes professionnels adéquats par l’accompagnement d’un professionnel-formateur expérimenté. Le professeur accompagnateur est alors un exemple à suivre et à imiter. Maturana et Varela (1994, p. 35) précisent pour leur part que « l’acte cognitif n’est pas le simple miroir d’une réalité objective externe, mais plutôt un processus actif, enraciné dans notre structure biologique, par lequel nous créons véritablement notre monde d’expérience  ». Ainsi, l’approche énactive considère l’activité humaine à l’image de la cognition — désignant alors le processus de la connaissance — comme radicalement incarnée, incorporée et située (Varela et coll., 1993). L’activité cognitive y est représentée comme une action corporellement inscrite dans les histoires vécues par l’acteur (Varela et coll., 1993). Ce dernier y évolue indissociablement de son environnement et vice-versa, en fonction de ses propres règles, dans son monde propre qui émerge de la relation mutuelle qu’il entretient avec son environnement (Maturana et Varela, 1994). Ainsi, l’énaction défend l’idée que la perception et l’action sont indissociables, et que seul l’étudiant a le pouvoir de construire sa propre motivation à agir selon la construction du sens qu’il donne à la tâche en fonction de sa culture et de son système de valeurs (Ortali, s.d.). En d’autres mots, l’étudiant ne peut simplement pas apprendre de quelqu’un d’autre ; le simple fait d’enseigner n’induit pas d’apprentissage chez l’étudiant, et ce n’est pas parce qu’il y a apprentissage qu’il y a eu un enseignement préalable. Ainsi, une formation énactive se fonde sur une participation active, égale et complète de tous les étudiants et du formateur quel que soit le niveau initial et final de compétence individuel de chacun (Coin, 2017). Ces pratiques s’initient et sont dirigées par l’expérience et les émotions des participants. Le professeur y joue un rôle de guide et de médiateur (Coin, 2017 ; Zorn, 2011), mais aussi de provocateur d’apprentissage au sens où son rôle consiste à « étayer le processus de redéfinition de la tâche effectué implicitement par l’apprenant » (Pastré, 2008, p. 136). Ainsi, comme l’expliquent Masciotra et coll., (2008, p. 13), le professeur « sait, entre autres, selon la situation dans laquelle il se trouve, s’engager avec ses meilleures dispositions, se positionner stratégiquement et transformer la situation à son avantage. Il sait aussi distinguer les moments où il faut agir des moments où il est possible de réfléchir. Le praticien énactif se distingue donc du praticien réflexif chez lequel l’accent est mis sur la réflexivité plutôt que sur l’agir  ». Cette conception de l’apprentissage et de l’enseignement entraîne un besoin de revisiter la manière de concevoir les dispositifs de formation qui ne peuvent plus être perçus comme des espaces de transmission des savoirs horizontaux du professeur vers l’étudiant.

Les dispositifs de formation

Selon Barbier (2020), l’intégration du travail et de la formation suppose la mise en œuvre de dispositifs supplémentaires par rapport à l’exercice du travail. Ces dispositifs se présentent sous la forme de moyens. Ils visent l’optimisation des apprentissages et ont une double finalité, soit la transformation du travail et la transformation des professionnels / travailleurs.

En ce sens, l’activité professionnelle mise en objet attribue un triple rôle à l’étudiant puisqu’il est partiellement responsable de faire le travail, de produire de nouvelles représentations sur son action et sur sa transformation en plus de mobiliser ces représentations dans et pour la conduite de son action. L’étudiant s’investit ainsi dans son action, mais aussi dans des activités de recherche et de formation relative à cette action :  action recherche et formation se mêlent alors à un niveau collectif et individuel (Barbier, 2020). Durand et coll., (2006) enrichissent l’idée en spécifiant que les apprentissages s’actualisent dans des configurations de l’activité collective. Dans cette logique, les apprentissages peuvent être optimisés par, dans, et à partir de la mise en situation de travail. Les dispositifs visant l’optimisation de l’apprentissage par la conceptualisation de situations d’apprentissage misent sur l’expérience vécue de l’étudiant et sur le « faire » (Barbier, 2020). L’accès à ce vécu est complexe et requiert généralement des démarches de construction créative, individuelle ou collective, d’un savoir approfondi du travail. On retrouve notamment des méthodes de description, d’introspection ou d’explicitation recherchant à exprimer la conscience préréflexive de l’activité (Barbier, 2020). Les approches utilisées dans cette logique privilégient la construction du sens de l’action, mais ne permettent toutefois pas de distinguer la connaissance de l’activité, de la transformation de l’activité, de la transformation de l’étudiant engagé dans le processus d’apprentissage (Barbier, 2020).

Ensuite, les dispositifs visant l’optimisation de l’apprentissage dans la situation de travail cherchent notamment à transformer l’étudiant, les activités et les situations d’action simultanément et à rappeler, individuellement ou collectivement, pour analyser l’action dans laquelle l’étudiant est engagé (Barbier, 2020). D’un point de vue méthodologique, on fait appel à la méthode de l’enquête et on y favorise les approches cognitives de conceptualisation. C’est dans cette catégorie que nous situons l’approche énactive puisque c’est dans la situation de travail que l’étudiant développera une « boucle d’activités sur et pour l’activité de travail [dont les résultats — des ressources pour l’action — seront ensuite] mobilisés, transférés, et utilisés dans l’exercice du travail » (Barbier, 2020, p. 7).

Enfin, les dispositifs visant l’amélioration de l’apprentissage « à partir » de la mise en situation du travail visent plutôt la construction et la reconstruction de la profession ou du métier, la modification des cultures professionnelles ou des gestes professionnels (Barbier, 2020). Suivant une approche énactive, l’activité professionnelle est constructive puisqu’elle permet à l’étudiant, l’enseignant ou le professionnel d’apprendre dans et par son travail, ses pratiques individuelles ou collectives, dans et par des formations ayant été spécifiquement conceptualisées en ce sens (Pastré, 2011; Pastré, Mayen et Vergnaud, 2006). En d’autres mots, l’étudiant réalise son activité ou construit ses connaissances dans et par l’action, c’est-à-dire dans et par l’actualisation de ses pratiques et savoirs professionnels dans les situations d’activité vécues ou provoquées lors de formations spécifiques (Pelissero, 2019). Nous y reviendrons avec quelques exemples.

En formation des adultes, les recherches portant sur l’analyse de l’activité selon des approches scientifiques proposent plus spécifiquement des programmes de l’activité humaine. On retrouve notamment des programmes de recherche empirique admettant l’analyse de l’activité dans différentes pratiques et des programmes technologiques qui permettent la conception de situations d’apprentissage (Durand, 2008; Theureau, 2004, 2006).

Programme de recherche empirique « cours d’Action »

Le programme de recherche autour duquel nous fonderons nos propos est celui du « cours d’action » de Jacques Theureau (2004, 2006, 2009). Fondé initialement en ergonomie de la langue française (Pinsky et Theureau, 1987), ce programme se situe dans une perspective d’anthropologie cognitive de l’activité humaine au travail et en formation (Theureau, 2004, 2006, 2009, 2015). Trois hypothèses ou postulats constituent son noyau dur :  l’énaction, la conscience préréflexive et l’activité-signe. Ces postulats déterminent notamment la définition des objets théoriques et d’étude, ainsi que les méthodes d’investigation. Les restrictions qu’elles imposent sur les modalités de recherche empirique et de conception d’environnement de formation sont d’ordre éthique, épistémologique et ontologique (Durand, 2008; Theureau, 2006). Nous nous concentrerons sur l’énaction.

La singularité de l’approche énactive sur laquelle se fonde le programme « cours d’action » tient de ses origines issues de la biologie du vivant (Varela, 1996; Maturana et Varela, 1994). Cherchant à spécifier les systèmes vivants par la conceptualisation en termes de processus qui les réalisent, Maturana et Varela (1994) ont proposé une nouvelle phénoménologie biologique qui définit les êtres vivants comme des systèmes dont leur organisation est qualifiée d’autopoïétique. Le terme autopoìèse dérive des mots grecs soi-même (auto), et création, production (poièsis), ainsi l’organisation d’un système autopoïétique est telle que son seul produit est lui-même : il n’y a aucune séparation entre le producteur et le produit (Maturana et Varela, 1994). Ceci signifie qu’« être » et « faire » sont indissociables de par ce mode d’organisation qui lui est spécifique (Maturana et Varela, 1994).

activité humaine comme objet d’étude et proxie d’une réalité complexe

L’hypothèse de l’énaction, telle que le propose le programme de recherche empirique et technologique « cours d’action », détermine que l’activité humaine est cognitive (Theureau, 2015). En d’autres mots et en rappel, la cognition représente l’activité concrète ou l’action incarnée qui résulte du vécu de l’acteur à chaque instant (Thompson, 2007; Varela et coll., 1993). Cette conception de l’activité humaine découle de l’hypothèse de l’autopoïèse qui s’appuie sur cinq présupposés, soit l’autonomie, le caractère incarné et incorporé, mais aussi situé de la cognition, l’auto-organisation, et la prise en compte de l’expérience à la première personne (Varela et coll., 1993; Maturana et Varela, 1994).

Les cinq présupposés de l’énaction

Le présupposé central est celui de l’autonomie qui soutient que l’acteur et son environnement sont liés par une relation cyclique — couplage structurel — qui n’admet ni à l’un ni à l’autre de préexister à la relation d’interdépendance qui les lie (Maturana et Varela, 1994). Concrètement, ce présupposé implique que l’acteur est considéré comme un système autopoïètique (Maturana et Varela, 1994) qui est à la fois ouvert à l’environnement, mais fermé sur le plan organisationnel par la clôture opérationnelle (Varela, 1979). Notons que la clôture opérationnelle consiste en l’activité auto-organisatrice et auto-productrice qui assurent l’autonomie des organismes vivants (Varela, 2017; Maturana et Varela, 1994). À partir des dynamiques de la clôture opérationnelle et du couplage structurel, l’acteur et l’environnement se façonnent mutuellement et perpétuellement (Maturana et Varela, 1994; Merleau-Ponty, 1945). En effet, selon la théorie autopoïétique, l’être vivant, à travers le mécanisme de son organisation interne, sélectionne les stimuli de son environnement auxquels il est réceptif, et la façon d’y répondre (Varela, 2017).

L’activité est une totalité autonome qui consiste en un couplage structurel entre l’acteur et son environnement. Ainsi, l’acteur et son environnement se co-définissent mutuellement (Poizat et Durand, 2015). L’activité est auto-organisée, c’est-à-dire qu’elle constitue un processus permanent de création et d’attribution de sens (Varela et coll., 1993). Ce couplage entre l’acteur et l’environnement est asymétrique au sens où c’est l’acteur qui détermine partiellement ce qui, dans cet environnement, est pertinent, significatif ou qui fait sens pour lui (Varela, 1989). De ce couplage structurel asymétrique émerge un monde propre, une perspective singulière de l’acteur sur l’environnement, l’activité, qui dépend de l’expérience personnelle de l’acteur, de ses propres intentions, des stimuli auxquels il est sensible. Lorsque des changements significatifs pour l’acteur se produisent dans son environnement, cela provoque des déséquilibres internes. Il en résulte des transformations structurales (des composantes, des mécanismes) chez l’acteur qui affectent ses états corporels, mentaux, et ses comportements (Durand, 2008; Maturana et Varela, 1980). Ces transformations telles que des apprentissages, par exemple, permettent à l’acteur de maintenir son organisation (les relations entre les composantes) la plus stable possible (Durand, 2008; Maturana et Varela, 1980).

L’expérience personnelle de l’acteur découle des capacités sensorimotrices qui s’insèrent elles-mêmes dans un contexte biologique, psychologique et culturel plus large (Varela et coll., 1993). L’activité est alors qualifiée d’incarnée et d’incorporée et est représentée comme une action corporellement inscrite dans des histoires vécues (Varela et coll., 1993). La cognition y est définie comme une propriété émergente du couplage structurel de l’histoire vécue et incarnée d’un être vivant avec son environnement (Varela et coll., 1993). Dans cette logique, l’activité humaine est un « cours d’action », un flux dynamique constructif (Barbier et Durand, 2017). La cognition émerge de schèmes sensorimoteurs ininterrompus qui régissent la perception et l’action (Thompson, 2007) et qui forment le monde-propre de l’acteur.

L’activité est une totalité radicalement et dynamiquement située en ce sens qu’elle émerge du couplage de l’acteur et de son environnement qui se spécifient mutuellement, naturellement et perpétuellement (Theureau, 2004, 2006; Varela et coll., 1993). Elle est donc indissociable de l’environnement spatial, temporel, matériel, culturel et social qui la spécifie et de l’acteur qui donne un sens à son expérience afin de réaliser cette activité.

L’activité prend en compte l’expérience à la première personne pour la connaissance de la cognition (Varela et coll., 1993). L’énaction précise que l’activité humaine s’accompagne toujours de l’expérience, également appelée conscience préréflexive. Sur le plan de l’analyse de l’activité, l’hypothèse de la conscience préréflexive complémente celle de l’énaction (Theureau, 2010). La conscience préréflexive consiste à « faire l’expérience que nous sommes en train de prendre conscience d’une action passée » (Durand, 2008, p. 194). Selon cette hypothèse, la conscience préréflexive peut s’exprimer partiellement par la réalisation des trois présupposés suivants (Theureau, 2010, 2015) : (1) la conscience préréflexive correspond à l’expérience qui émerge du vécu qui accompagne l’activité humaine à chaque instant. C’est par la mise en place d’un ensemble de conditions favorables par un observateur-interlocuteur externe, notamment le formateur, que l’acteur peut décrire, quoique partiellement, son activité ou tout du moins sa compréhension de celle-ci. (2) La description de son activité par l’acteur constitue l’expression des interactions asymétriques entre lui et son environnement ainsi que leur organisation temporelle complexe. En d’autres mots, cette expérience partielle est l’effet de surface (ce qui émerge) de la dynamique du couplage structurel acteur-environnement. (3) Enfin, cet effet de surface se transforme par une prise de conscience ponctuelle, et transforme l’activité qui suit cet instant. L’observateur-interlocuteur accède à l’expérience de l’acteur lorsque ce dernier raconte, montre, simule, commente ce qui est significatif pour lui dans une situation particulière. Quoique le couplage apprenant-environnement soit en constante transformation et que l’activité se caractérise par une singularité de chaque instant, il est possible d’identifier des régularités dans son activité (Durand, 2008). C’est à partir de cette analyse que la rencontre entre l’activité, la formation et la recherche se réalise et engendre la transformation du travail.

Enfin, selon l’hypothèse de l’activité-signe, l’activité donne lieu partiellement à l’expérience de l’acteur, c’est-à-dire à l’intuition d’agir (Durand, 2008), qui, de cette expérience, peut être décrite comme une concaténation de signes.

Ces présupposés seront illustrés par des exemples dans la section discussion.

défi de l’activité prescrite et de l’activité réelle en formation

Qui dit activité, dit tâche et prescription. En effet, l’analyse de l’activité en éducation est souvent présentée par l’accomplissement de tâches sous forme de prescriptions qui véhicule l’idée d’un répertoire de ce qui devrait être fait ou pas (Poizat et Durand, 2015). Pourtant, les ergonomes francophones soutiennent que « qu’elle que soit la pratique professionnelle, il existe un écart entre le travail prescrit et l’activité réelle » (Poizat et coll., 2013, p. 99). Le travail peut ainsi être considéré comme un objet constitué de deux pôles : le travail prescrit relevant de ce qui doit être fait en fonction des normes, des règles, de résultats attendus, d’exigences professionnelles, de l’organisation et procédures plus ou moins standardisées, etc.; et l’activité réelle qui représente ce qui est fait par l’acteur qui réalise la tâche (Barbier et Durand, 2017; Berthet et Cru, 2003). La tâche réelle se réalise selon des séquences opérationnelles effectuées par les professionnels qu’on nomme « cours d’action » (Theureau, 2004). Puisque l’activité humaine est cognitive (Theureau, 2015), toute activité s’accompagne potentiellement d’apprentissage ou de développement. Cependant, il ne suffit pas d’exposer le formé aux différents aspects du travail réel par des activités professionnelles modélisées dans un cadre fixe pour qu’il apprenne ou développe des compétences. Une formation professionnalisante sous la perspective énactive organise un environnement universitaire qui autorise et encourage la sélection, la mobilisation et la combinaison pertinente par le formé de ressources, internes et externes à celui-ci, afin d’accomplir la tâche (Mottier Lopez, 2016; Terré et coll., 2016). Cet environnement doit posséder des caractéristiques favorables aux apprentissages souhaités. En effet, puisqu’il est impossible de transformer l’activité de l’extérieur, il faut concevoir des environnements potentiellement perturbateurs pour tenter d’orienter et accompagner des transformations améliorées éventuelles (Barbier et Durand, 2017). Afin d’augmenter la probabilité de perturbation de l’environnement de formation, le professeur peut avoir recours à la conception d’artefacts visant à favoriser l’apprentissage / développement du formé. L’énaction en formation des adultes fait émerger le caractère auto-transformatoire des acteurs (Theureau, 2015; Amigues, 2003; Varela 1989), lequel dépend du sens que ces derniers donnent aux artefacts mis à leur disposition (Durand, 2008 ; Leblanc et coll., 2008; Theureau et Jeffroy, 1994; Winograd et Florès, 1986). Les artefacts sont des offres ou des possibles pour les acteurs, qui enrichissent l’environnement des formés (Durand, 2008; Veyrunes et coll., 2014). Leur usage transforme l’environnement des acteurs provoquant ainsi potentiellement leur activité. Une fois intégré, l’artefact devient un élément significatif dans le couplage structurel et devient «  transparent » (Durand, 2008).

Sous la perspective énactive, il ne s’agit effectivement pas de prescrire certaines pratiques à travers des environnements et des situations préconçues, mais plutôt de proscrire des façons de faire jugées contre-productives du point de vue de l’apprentissage / développement ou éthiquement inacceptables (Leblanc, 2012). Tout ce qui n’est pas interdit par le formateur est autorisé pour le formé. Dans le cadre du programme scientifique technologique que nous discutons dans cet essai, Durand (2008) propose la notion d’« espaces d’actions encouragées » (EAE) pour modéliser l’activité cible comme des « dérivations » de la réalité ou des transformations des environnements de l’activité cible. La transformation est rendue possible par le formateur par l’acte d’encouragement de certaines actions en facilitant, en validant ou en valorisant leur avènement, ou par l’acte de découragement de l’action du formé en spécifiant des impossibles ou des interdits. C’est-à-dire en proscrivant ce qu’il ne faut pas ou qu’il ne faut plus faire (Barbier et Durand, 2017; Durand, 2008; Stewart et Varela, 1994).

En ce sens, la perspective énactive peut être rapprochée de la proposition de Le Boterf (2011) qui définit la pratique professionnelle comme le déroulement des micro-actions, des décisions et des interactions qu’un professionnel met en œuvre pour réaliser le travail ou l’activité prescrite. Le but est de résoudre une situation problématique afin de répondre à des exigences fixées par des procédures ou indiquées dans un référentiel. En effet, dans la logique du cours d’action (Theureau, 2004, 2006), il est possible de découper l’activité, de manière spontanée, en unités significatives du point de vue de l’acteur, l’étudiant. Ces unités représentent des actions, des interprétations ou des émotions et sont constituées de plusieurs composantes à la fois différentes indissociables les unes des autres. Ainsi, afin d’accéder, quoique partiellement à l’expérience de l’acteur par des environnements de formation, certaines conditions favorables à l’expression de l’expérience telle que vécue par l’acteur doivent être considérées (Durand, 2008).

Selon Durand (2009) un environnement de formation efficace doit nécessairement avoir un certain degré de ressemblance avec l’environnement de travail de référence. Cet environnement devrait engager les formés dans une « expérience fictionnelle » à la manière de Schaeffer, 1999 et Zaccaï-Reyners, 2005 (Durand, 2009). L’activité des formés résulte en une activité comparable à celle qualifiée de « production fictionnelle » par Schaeffer et repose sur une « immersion mimétique » dans l’environnement de formation. En d’autres mots, ces environnements de formation proposent une « modélisation métaphorique de l’expérience » où l’activité du formé est marquée par une « feintise ludique partagée ». L’immersion mimétique se réalise, par exemple, par des environnements de simulations dans lesquels le formé est plongé. Il est attendu qu’il fasse « comme si » il était sur le terrain de travail : son engagement dépend alors de la qualité de la ressemblance entre l’environnement de formation et l’environnement de travail. Un exemple de conception d’espace de formation sera explicité dans la section suivante de cet essai.

Exemples d’application de l’énaction en formation universitaire professionnalisante

Dans cette dernière partie du texte, nous proposons d’illustrer quelques applications de l’énaction en formation universitaire professionnelle afin de discuter l’hypothèse selon laquelle l’environnement et l’acteur forment une totalité indissociable dans une approche où la transformation est dès lors individuelle et collective. Dans ce cadre, se précisent deux types d’activité, individuelles et collectives, l’une émergente de l’autre (Barbier, 2020; Durand et coll., 2006). La perspective énactive peut alors aller au-delà de la formation traditionnelle cognitiviste lorsqu’elle tente de reproduire des savoir-faire, telle une recette. Dans ce cadre, l’approche énactive permet le débat sur «  la conception d’outils innovants pour agir dans des environnements dont la problématique est porteuse de questions clés d’apprentissage / développement individuel et collectif  » (Durand, 2008, p. 104). De ce fait, dans les formations universitaires professionnalisantes, elle permet à plusieurs égards de contribuer à l’éducation des adultes, tant au niveau théorique que pratique. Plusieurs exemples issus de la recherche et de pratiques en salle de classe ont donc été retenus.

La posture énactive invite à modéliser tout phénomène comme une entité autonome définie par ses interactions avec les autres phénomènes (physiques, culturels et sociaux). Tout apprentissage ou acquisition de compétences peut être appréhendée à partir de l’expérience de l’étudiant en interaction avec son environnement de formation. Ainsi, par une approche énactive, le professeur et l’étudiant vont favoriser ensemble une expérience d’apprentissage holistique. Le professeur, ne pouvant pas transmettre son expérience professionnelle à l’étudiant, devra développer un environnement d’apprentissage enrichi par des artefacts significatifs pour l’étudiant. Selon le sens que l’étudiant donnera aux artefacts qui seront mis à sa disposition, il élargira ses possibilités d’action. C’est de cette valse de significations et de possibilités que le professeur et l’étudiant construisent ensemble une expérience commune qui émerge de leur expérience individuelle. À titre d’exemple, imaginons une activité consacrée à la réalisation d’une situation concrète proposée dans le cadre d’une simulation ou un jeu de rôle. L’étudiant et le professeur opèrent dans l’action, par l’action et en situation. Ils seront alors dans une posture énactive si et seulement si l’un et l’autre énactent leur monde propre en même temps qu’un monde commun en interagissant entre eux et avec leur environnement (Maturana et Varela, 1994).

Les acteurs, l’étudiant et le professeur, sont alors tous deux nécessairement transformés par le couplage acteur-environnement. Dans un tel espace de formation, l’étudiant s’inclut dans l’environnement du professeur qui à son tour s’inclut dans l’environnement de l’étudiant. Ces transformations internes qui en résultent, par exemple les apprentissages, dépendent strictement de l’organisation de l’acteur en constante recherche d’équilibre. À l’inverse, « l’environnement contraint l’organisation bio-cognitive, en lui offrant des matériaux servant à son édification, mais aussi et surtout, en exerçant, par ses lacunes et ses carences, une pression de sélection sur elle » (Varela, 2017, p. 20). L’apprentissage est donc en constante transformation selon les contraintes et les pressions qu’exerce l’environnement sur l’acteur et les significations que l’acteur donne aux composantes de son environnement. Dans un tel contexte, l’environnement de formation doit être conçu avec l’intention de provoquer l’acteur sur différents plans parce que tout apprentissage qui en émerge dépend strictement de l’autonomie organisationnelle interne de l’acteur, assurée par les couplages structurels et la clôture opérationnelle.

Suivant le présupposé voulant que l’activité soit auto-organisée, lors de la conception d’environnements de formation professionnalisants, il incombe au professeur de tenir compte notamment des expériences passées, de la personnalité, de l’histoire, et des intentions de l’acteur (Theureau, 2010; Varela et coll., 1993; Maturana et Varela, 1994). C’est partiellement l’étudiant qui détermine à chaque instant ce qui, dans son environnement de formation, est porteur de sens pour lui sans se soumettre à la prescription de stimuli, mais en déterminant ses propres sources de perturbations (Poizat et Durand, 2015; Terré et coll., 2016; Varela, 1989). La qualité des apprentissages dépend alors de la capacité du formateur à rendre l’environnement de formation le plus signifiant pour l’étudiant, dans les limites du possible.

Conception d’environnement en formation professionnelle

Dans le cadre du programme scientifique technologique, qui vise la conceptualisation de situation d’apprentissage, il est nécessaire d’établir une collaboration précise et contractuelle entre le formé et le formateur / chercheur (Durand, 2008, 2009). Cette collaboration a alors pour objectif la conception dynamique et évolutive de dispositifs de formation en cohérence avec les présupposés théoriques de l’énaction et de la conscience préréflexive. La création de ses dispositifs de formation s’appuie donc sur la connaissance de l’activité réelle, c’est-à-dire l’expérience professionnelle du formateur de la pratique ciblée, de sa créativité, mais aussi de la culture de la profession et des travaux de recherche portant sur l’analyse de l’activité et sur la formation (Durand, 2008). La mise en œuvre d’une telle conception d’environnement de formation requiert que la collaboration entre le professeur et l’étudiant perdure à long terme. Il est donc attendu de l’étudiant qu’il a) s’engage pleinement et en toute connaissance dans le projet technologique; b) consente à être observé lorsqu’il est engagé dans cet environnement formatif; c) exprime ouvertement et authentiquement ses expériences durant la formation; d) contribue à la conception de l’environnement formatif par une évaluation guidée et des propositions de transformation de l’environnement; et parfois e) accepte de poursuivre la conception d’environnements de formation éventuelle conduisant à une auto-formation à partir de principes préalablement précisés dans les phases initiales du projet (Durand, 2008).

À partir de ces préalables de la collaboration étudiant-professeur-formateur, Durand (2009) propose cinq principes d’opérationnalisation visant la construction de dispositifs de formation : 1) aider et influencer l’activité des étudiants pour la transformer; 2) proscrire et non prescrire; 3) prendre une activité cible pour référence; 4) assurer le lien entre le travail (l’activité cible) et l’activité en formation; 5) assurer le pont entre l’activité en formation et l’activité cible. Les principes de conceptions d’environnement de formation permettent au chercheur ou au professeur d’accéder, quoique partiellement, à l’expérience de l’acteur, soit l’étudiant et le professeur. Ils se fondent sur la mise en place de certaines conditions favorables à l’expression par l’acteur de son expérience (Durand, 2008, 2009) : a) une coopération contractuelle explicite entre le professeur et l’étudiant sur l’activité de ce dernier qui garantit sa sincérité et son authenticité ; b) l’expression par l’acteur de sa conscience préréflexive pendant la pratique lorsque c’est possible ou a posteriori lors de séances d’auto-confrontation au cours desquelles il est incité à se remettre en situation dynamique, c’est-à-dire à refaire l’expérience qui a été la sienne, alors qu’il est confronté à des traces de cette activité passée (généralement des vidéos) ; c) un accompagnement par l’analyse de l’expression de cette expérience.

Ces principes corroborent le présupposé énactif de l’activité humaine du couplage structurel qui exprime la relation d’interdépendance entre l’étudiant et son environnement de formation, ainsi que leur spécification réciproque au cours de la durée de la formation (Durand, 2009; Mottier Lopez, 2016; Terré et coll., 2016). En d’autres mots, l’étudiant possède un certain bagage d’expériences, une histoire génétique et expérientielle, ainsi que des sensibilités qui lui sont propres. À partir de ces caractéristiques, il façonne son environnement de formation par ses actions qui varient selon le sens qu’il attribue aux artefacts mis à sa disposition, mais aussi en fonction de la sélection des stimuli de son environnement auxquels il répond. L’environnement étant simultanément transformé par les actions du formé, l’étudiant se voit à son tour modifié constamment et perpétuellement offrant ainsi d’autres stimuli et d’autres artéfacts au formé. L’analyse de l’activité définie comme un couplage structurel entre l’étudiant et son environnement (Varela et Maturana, 1987) permet de révéler l’expérience vécue de l’étudiant dans son rapport à son environnement, mais aussi celui des acteurs de son entourage. En outre, le professeur conduit une évaluation de l’action immédiate et future de l’étudiant qui conduit à un perpétuel réajustement entre deux acteurs (le formé et le formateur) dans le flux du cours d’action. Le professeur faisant partie et agissant lui aussi dans cet espace de formation, il le transforme à son tour à partir de sa situation propre. Le couplage professeur-environnement suit alors la même boucle d’auto-transformation que le couplage étudiant-environnement décrit précédemment. Ces couplages structurels créent ainsi un monde propre au professeur et un monde propre à l’étudiant qui cohabitent physiquement dans le même espace, mais dont le sens donné aux diverses ressources accessibles à l’un et l’autre diffère par le caractère auto-organisationnel de l’activité. De sorte que l’apprentissage n’est pas seulement concentré sur les savoirs, mais sur l’ensemble de l’activité organisée en interaction avec son environnement. Une fois que l’évaluation de l’apprentissage est organisée sous la forme d’exercices pratiques tels que des simulations rappelant la tâche réelle, ce présupposé appelle l’acteur et son environnement à s’auto-transformer de manière récurrente et perpétuelle. Les « outils », ressources internes et externes, que sélectionne, mobilise et combine l’étudiant font ainsi partie intégrante de lui et de son environnement. Ce présupposé réunit le corps et l’outil de sorte que ce couplage est l’incarnation d’un savoir-agir.

Leblanc et coll., (2021) précisent qu’en situation de formation professionnelle, le processus mimétique accompagné par des entretiens d’auto-confrontation ne permet pas seulement de prendre conscience de la relation déconstruction-reconstruction, mais peut également « déboucher sur des possibles d’action jugés transférables dans le réel » (2021, paragraphe 11). Ces environnements de formation consistent à présenter un enregistrement d’une situation filmée-commentée ou filmée-simulée aux formés tout en les filmant à leur tour pour capter leurs impressions, leurs comportements, leurs réactions. Par la suite, les étudiants réalisent une activité de comparaison entre ce qu’ils perçoivent de l’activité des acteurs dans la situation filmée avec ce qu’ils font ou feraient dans une situation de travail similaire. Les retombées de ces espaces de formation qui nous apparaissent les plus intéressantes sont les transformations vécues par les étudiants, lors des visionnements et les répercussions de cette activité, dans les séances suivantes de formation. En effet, durant le visionnement, les étudiants affichent un comportement immersif, comme faire des mouvements pour suivre inconsciemment celui de la vidéo. La confrontation de l’étudiant avec les commentaires du protagoniste de l’enregistrement l’amène à interroger ouvertement le protagoniste, à reconnaître des problèmes de l’exercice de la profession, etc. Ces expériences mimétiques transforment ainsi les cadres de référence et l’expérience de l’étudiant par son observation. C’est un moment de réorientation des préoccupations de l’étudiant, de ses perceptions et de recherche d’action. De plus, l’environnement de formation ainsi conçu permet le prolongement de ses apprentissages au-delà de la vidéoformation, dans la pratique. Pour certains, il s’agit de transformations significatives émergentes observables par les professeurs.

En médecine, il est désormais possible de créer des simulations si proches de la réalité chirurgicale que le résident en action peut faire corps avec ses outils de travail, des artefacts, induisant un couplage structurel par son activité de simulation. L’outil devient alors «  transparent  » pour l’étudiant (Durand, 2008). Par exemple, le bistouri en salle de chirurgie qui devient une extension de la main du médecin en formation avec lequel il peut agir sur le corps du patient. Au moment de procéder à la chirurgie, l’étudiant ne pense plus à l’instrument qu’il tient dans sa main, mais uniquement aux sensations en cours d’opération et aux gestes professionnels qu’il doit exécuter avec minutie sous la supervision du médecin superviseur de stage. L’activité est alors à la fois corporellement, spatialement, temporellement, et culturellement située (Durand, 2008). Avec cette approche, tant le professeur que l’étudiant et leur environnement se façonnent mutuellement et perpétuellement. Du point de vue de l’étudiant amené à réaliser des activités pédagogiques, comme c’est le cas des simulations virtuelles en chirurgie, il importe d’analyser les connaissances acquises du point de vue de l’impact qu’elles ont sur son mode de raisonnement et de ses réflexions qui doivent être ultimement transformateurs. Ce faisant, l’approche énactive ne va pas sans rappeler ce qu’écrivait Merleau-Ponty (1945, p. 178) : «  Le bâton de l’aveugle a cessé d’être un objet pour lui, il n’est plus perçu pour lui-même, son extrémité s’est transformée en zone sensible, il augmente l’ampleur et le rayon d’action du toucher, il est devenu l’analogue d’un regard.  »

Cette perspective s’illustre également dans d’autres disciplines universitaires comme celle de la musique. Les arts instrumentaux s’intéressent à l’approche énactive, car elle permet l’analyse de la relation avec l’artefact. En effet, pour le musicien, l’instrument est essentiel à sa performance et doit être intégré dans l’environnement de l’étudiant. Ici encore, l’étudiant doit oublier l’instrument physique, le lutrin et la partition qu’il utilise, voir l’environnement physique et social dans lequel il se situe pour produire une interprétation de haut niveau. Le musicien forme alors une totalité qui incorpore et incarne l’instrument par l’intégration des artefacts mis à sa disposition. Le son issu de l’instrument manipulé par l’étudiant est en action pour l’action et la perspective énactive se réalise alors dans et par le faire, n’opérant ainsi aucune dichotomie. Autrement dit, il est en situation d’interaction incarnée dans le sens où il subit une transformation qui s’opère dans l’action. Cette perspective énactive est mise en lumière dans la thèse de Christou (2014) par une analyse de plusieurs œuvres, comme celles de IAMSCOPE ou encore celles de Char Davies. Ce faisant, dans un contexte de formation universitaire professionnalisante, l’énaction offre de nouvelles perspectives pédagogiques, soit de nouvelles façons de conceptualiser l’espace de formation, les relations du couplage structurel acteurs-environnement-artefact, et plus encore. En effet, l’énaction inspire la conception d’espaces de formation immersive complète pour l’apprenant grâce à une expérience fictionnelle modélisée par le professionnel-enseignant.

Ainsi, en 2015, Ivan Magrin-Chagnolleau propose une pédagogie énactive en administration du spectacle de l’Université d’Évry. Cet auteur, chercheur et professeur, a offert aux étudiants un environnement de création en imposant quelques proscriptions. Ces dernières ont alors orienté le processus cognitif des étudiants dans une certaine direction, à l’avantage des apprentissages qu’ils auraient réalisés en contexte de travail. Ces processus ont ensuite influencé l’environnement initial de formation et ainsi de suite. La consigne initiale était simple : créer un spectacle pour la fin de l’année. Le rôle du professeur serait minimaliste (de facilitateur et de médiateur) et les étudiants seraient libres d’intégrer ou non les suggestions et commentaires du professeur. L’objectif était d’amener les étudiants à vivre les périodes d’incertitude et de prise de décision que rencontrent les professionnels dans le milieu de la création artistique. La liberté offerte aux étudiants et la pédagogie mise en œuvre ont ainsi permis de faire émerger le sens de responsabilité, d’organisation et de prise en charge chez les étudiants. Elle a également permis l’émergence de groupes de travail en fonction des envies diverses et individuelles des étudiants, par exemple, la création d’une pièce de théâtre ou celle d’une articulation entre le cirque et la musique. Les compétences de travail collaboratif ont ainsi émergé d’elles-mêmes chez les étudiants à partir de leur expérience individuelle et collective. En outre, les questions relatives à l’organisation du cours telle que l’évaluation des apprentissages ont émergé du processus de création que suivaient les étudiants et ont été satisfaites par les étudiants eux-mêmes. Le professeur termine son article en spécifiant que les étudiants «  ont aussi apparemment compris à quel point le groupe pouvait être porteur d’un dépassement de soi pour chacune et chacun  » (Magrin-Chagnolleau, 2005).

Conclusion

Cet essai consiste en une première réflexion qui nous amène à questionner la transformation individuelle et collective de l’éducation par les formations professionnelles universitaires sous une perspective énactive. Il s’agit d’une invitation au dialogue entourant l’hypothèse selon laquelle l’environnement de formation professionnalisant et l’acteur forment une totalité indissociable. Cette idée est illustrée par le couplage asymétrique de l’acteur avec son environnement, c’est-à-dire que l’activité, qui spécifie partiellement l’environnement dans lequel elle se réalise, doit nécessairement le prendre en compte. L’asymétrie désigne ici le fait que seul l’acteur peut donner sens à ce qui, dans cet environnement, est significatif pour lui en fonction de son état physique, émotif, psychologique, son passé, ses intentions, etc. Ainsi, l’acteur fait énacter son monde propre à partir du rapport qu’il entretient avec son environnement (sociale et physique).

Corollairement, la réflexion sur l’apport de l’énaction aux formations professionnalisantes revisite le rôle de chacun des acteurs, soit le professeur et l’étudiant, dans la relation pédagogique qui s’établit en situation de formation énactive. En effet, le rôle du professeur ne peut pas instruire l’étudiant par transmission de connaissances ou même prescrire et transformer son activité de manière directe. Le professeur occupe plutôt un rôle d’accompagnateur des transformations qu’il aura déclenché chez l’étudiant. La pédagogie consiste alors à énoncer des prescriptions — des interdits ou des contraintes — afin de créer des espaces de possibles dans lesquels l’étudiant, par le couplage structurel et les contraintes établies par le professeur, fera émerger des séquences d’activité nouvelles ou de nouveaux apprentissages (Durand, 2008). Selon cette vision, même si le professeur a le rôle d’assurer un environnement le plus perturbateur possible pour l’étudiant, ce dernier perturbe nécessairement lui aussi l’environnement du professeur. Les deux acteurs font par conséquent constamment et perpétuellement émerger à la fois un monde propre et collectif. Cette relation est alors créatrice de sens et d’apprentissages mutuels. Ainsi, l’acte d’enseigner ne se suffit pas en lui-même ni celui d’apprendre. Comme le soulignent Maturana et Varela (1994), l’organisation d’un système autopoïétique, que nous avons nous aussi adapté à l’éducation, a pour spécificité de souligner l’émergence d’un monde propre issu du couplage structurel asymétrique. Enfin, cet essai a permis d’illustrer la mise en œuvre de présupposés autopoïétiques sur lesquels s’appuie l’énaction, notamment dans un contexte de formation universitaire professionnalisante. Les limites de cet essai sont d’ordre méthodologique. En effet, la recension des écrits n’est pas exhaustive et ne résulte pas d’une recherche continue dans la littérature. C’est pourquoi nous considérons cet essai comme une première tentative de réflexion visant à stimuler le dialogue autour de l’apport des approches énactives à la formation universitaire professionnalisante.



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